Si le titre est en anglais, la vague est apatride
C’est la fin du festival international de film de surf qui se déroule chaque année en juillet à la Chambre d’Amour, plage d’Anglet, dans le Pays Basque. Une présentation, en plein air et gratuite, de créations autour de la discipline aquatique. Si on peut parfois regretter les faiblesses scénaristiques de certains films sélectionnés, quelques perles d’aventures et de dépaysement non négligeables sont sorties du lot, et de l’eau, durant ces trois jours. Ce n’est pas par chauvinisme fête-nationale que j’ose l’affirmer, mais ce sont les petits bretons de Lost in the Swell qui l’emportent haut la main sur la barre. Jusqu’à preuve du contraire, je ne suis pas membre du jury, et ils n’ont pas été sacrés « meilleur film », honneur qui revient au très joli « The Fisherman’s son » de Chris Malloy, en revanche, le public, dont je fais, pour le coup, partie, les a récompensés de son prix sous des applaudissements fournis.
Si Ronan Gladu, le cameraman de l’épopée, était notre invité à Brest durant la grande tournée, on n’était loin d’imaginer le périple en question, voyage marin de plus de 1500 km autour des îles Salomon à bord de “Gwalaz”, un petit trimaran, prototype unique au monde, construit en fibre de lin, liège et balsa par le navigateur de course au large Roland Jourdain. Présenté au départ comme une web série, Lost in the Swell est un Endless Summer à la française qui rencontre avec humour, philosophie et humanisme, un Koh Lanta écolo, et les 3 mois de périple dans l’océan pacifique, se partagent comme un poisson salutaire attrapé au bord de la famine. Un juste équilibre entre plaisir et nécessité, voilà ce qu’est Lost in the Swell. Petits Corto Maltesses à voile, marins d’eaux très salées, ils voguent, Ewell, Aurel et Ronan, de vagues en vagues, d’îles désertes en rencontres habitées, d’engagements au quotidien, de galères sans noms ou qui portent ceux de moustique, de croco, de cyclones, le tout habillé de Fakear ou Quantic…A s’offrir en DVD pour garantir, après Dés îles Usions autour de la Bretagne et Lost in the Swell, une troisième expédition toujours étonnante dont la destination et le moyen de transport sont encore à définir.
On salue également le film allemand de surf en eaux froides, Headache, mention spéciale du jury. Une balade hivernale presque mystique et brumeuse autour du Danemark, de l’Irlande, de l’Ecosse, et de l’Islande, et qui joue de la caméra et des expériences d’image aussi bien que des vagues grises, désertes et impressionnantes qui jalonnent les étendues glacées et minérales.
Pour finir, et pour la sensation frissonnante, on a poussé des hoo, et des haaa assis sur la pelouse face à la mer, comme sur grand écran la monstrueuse houle de Nazareth au Portugal déferlait ses xx mètres de haut avec majesté, avec en son intérieur le surfeur Eric Rebière.
En quelques jours, on a voyagé très loin, on a compté, depuis le toit de la cité de l’Océan, les couchers de soleil en pariant sur le nombre de minutes restant avant sa disparition, là-bas, derrière sa ligne d’horizon, on a bu de la bière locale et mangé des chipirons, on a chopé une insolation à regarder des films sur des transats, on en a déliré des ailleurs de pieds nus et de toutes les vagues du monde qui se tiendraient par la main, ben quoi, c’est dans l’esprit… A l’année prochaine.