La plage, ça va bien cinq minutes. Au retour des bancs de sables ou de galets, peau grillée par les ultraviolets, un beau carré d’assos locales – Musical Écran, le Fifib, Ciné-Marges-Club et le Cinéma Utopia – rallument les projos pour la première édition d’Écran Total. Quatre jours d’un mini-festival dédié au cinéma, en plein air comme dans les salles obscures, histoire d’exorciser la morosité et de réaffirmer les pouvoirs salvateurs de la culture, des cultures, face aux concessionnaires et autres pharmaciens.
En ouverture, le lundi 27 juillet, place à un pays qui a fait du surréalisme sa deuxième raison d’être, de Magritte à Noël Godin en passant par Michel Mariën : la Belgique. Un arrêt Ostende avec un film culte, s’il vous plait ; un long-métrage fantastique à plus d’un titre, disponible en copie restaurée : Les Lèvres Rouges, d’Harry Kümel. Un long-métrage vampirique et ambigu, proche des gialli d’Argento, merveilleusement servi par François de Roubaix à la BO et l’iconique Delphine Seyrig dans le rôle principal, ensorcelante diffraction de la comtesse sanglante, Élisabeth Bathory.
La suite sera punk, pop et queer.
Pour la punky reggae party, voyez avec White Riot, documentaire de Rubika Shah projeté en avant-première, qui plonge dans le Londres de la fin des 70s, à l’intersection de l’explosion no future et du thatchérisme qui se dessine à l’horizon. Et au milieu de ce carrefour très agité, The Clash, qu’on ne présente plus mais qu’on va suivre à la trace dans leur combat rock mené Doc’s aux pieds et guitares à la main.
The Clash, allègrement samplé par M.I.A sur son tube « Paper Planes », et magie de la transition, on retrouvera la popstar anglo-srilankaise le même soir, dans Matangi/Maya/M.I.A, un doc qui retrace son étonnant parcours, de sa famille tamoule au sommet des charts mondiaux en passant par ses rencontres avec Justine Frischmann (la chanteuse d’Elastica) ou Diplo.
Un long-métrage dont la première projection bordelaise à ciel ouvert avait connu quelques impondérables météo – une alerte orage … Croisons les doigts pour qu’il n’en soit pas de même cette fois.
Enfin, en guise de conclusion, vous pourrez dégainer vos mouvements les plus élaborés, grâce à une soirée spéciale voguing, cette danse et ce mouvement nés dans les ballrooms LGBT afro-américains à la fin des années 70, parodiant la sophistication modeuse – le terme vient du magazine Vogue. À l’affiche : une sélection musicale assurée par les « du.re.s à queer » de Bordelle, une démonstration de voguing animée par Lasseindra Ninja et la projection (en avant-première, là aussi) de Fabulous, un moyen-métrage qui suit, justement, Lasseindra Ninja et ses élèves guyanais.es grâce à la caméra d’Audrey Jean-Baptiste.
Si on ajoute à ce programme déjà bien fourni des DJ-sets de Krappy Raw, de Breizmatazz ou des Saintongeais.es de Coconut Music, ainsi que les longs-métrages indés de Pablo Larrain (Ema), Sophie Deraspe (Antigone) et John Cameron Mitchell (Hedwig and the Angry Inch), vous conviendrez que cet Écran Total tape dans le mille pour réveiller nos ardeurs de cinéphiles et de curieux.ses. Tout sauf un écran de fumée.
Écran Total, du lundi 27 au jeudi 30 juillet @ Cinéma Utopia et Cour Mably (Bordeaux).