Les titres de spectacles de Frédérick Gravel, c’est tout un poème. Après Usually Beauty Fails et This Duet That We’ve Already Done (so many times), place désormais à Some Hope for The Bastards. Un peu d’espoir pour les bâtard.e.s, sobriquet accolé ici à la dizaine de danseur.se.s qui composent les tableaux de cette pièce oscillant entre duos forcenés et puissance du nombre.
Accompagné de son gang du GAG (aka le Grouped’ArtGravelArtGroup, mais c’est quand même plus court de dire GAG), le chorégraphe québécois investigue dans ce spectacle la dimension sisyphéenne de la fête, sa promesse de libération qui s’évanouit à peine accomplie. Avec le renfort d’un groupe rock jouant live, il donne des teintes sombres, parfois sordides, aux montées d’adrénaline, à la proxémique et aux pulsations secrètes ou ostensibles propres à ces instants de réjouissances – ou, du moins, affichés comme tels.
« La fête se résume plus souvent en un défoulement, à une courte anesthésie programmée, de façon à survivre la prochaine semaine de travail acharné. Il y a quelque chose d’insatisfait chez moi face à cela. Cette fête ne construit rien », affirme ainsi Frédérick Gravel, qui poursuit : « On devrait peut-être accepter notre laideur et nos peurs et construire nos vies communes en se disant qu’il faut trouver des stratégies pour vivre ensemble. »
Voir dans le divertissement une simple diversion vis-à-vis du réel, un exutoire individualiste qui ne change pas grand-chose au schmilblick contemporain (voire, qui en renforce son cynisme) : le postulat peut tout aussi bien passer pour un diagnostic progressiste ou un parti pris rétrograde à souhait, selon d’où on le regarde – et non, je ne fais pas allusion à la corbeille ou au paradis.
Pour savoir où vous vous placerez, le Carré-Colonnes est une adresse toute indiquée ; une adresse que nous vous ouvrons volontiers avec le mot de passe Nova Aime du bonheur. Indice, c’est un mot qui ne va ni sur les vagues ni dans une publication DC Comics.