Étrange monde que celui du mondo. Cousin farfelu et dévoyé du grand reportage, ce genre cinématographique prétendument ethnologique, dédié aux exotismes les plus chelous et les plus caricaturaux, a connu son âge d’or dans les 70s et au tout début des 80s. Bidonné à peu près 9,93 fois sur 10, le mondo se distingue par sa haute teneur en séquences improbables, fascinantes parfois, bidonnantes souvent, mémorables toujours ; en même temps, c’était le but avoué de ces films, plus racoleurs qu’une vitrine de quartier rouge.
Un exemple, pour vous donner une idée du n’importe quoi ambiant ? Mais tout à fait, avec joie :
Et ce monde, qui, mieux que Sébastien Gayraud et Maxime Lachaud, pourrait vous le faire parcourir ? Auteurs de Reflets dans un oeil mort, livre référence sur le mondo (et dont on attend avec impatience une réédition, à bon entendeur …), ces deux spécialistes du genre vous conteront par le menu l’histoire, les particularités, les petites anecdotes et les dérives de cette excroissance sensationnaliste du documentaire. « Documenteur » ? « Chocumentaire » ? À vous de choisir votre mot-valise préféré en envoyant 1 ou 2 par SMS. Ou par pigeon voyageur, pour les plus colombophiles. Bref, avant que vous vous soyez décidé, vous serez catapulté.e.s à cette époque où le terme de « fake news » n’était pas rentré dans le langage courant en faisant élire des « fascistes de merde » bien moins sympathiques que Georges Abitbol.
Mais si la théorie c’est bien, vous vous en souvenez sans doute depuis vos années lycée, c’est encore plus probant quand c’est corroboré par un bon exemple. La suggestion tombe au poil : l’association Monoquini vous a mis sur pied une petite projection de derrière les fagots, nickel pour vous mettre au parfum du mondo.
Parfait représentant du genre, c’est L’Amérique interdite, de Romano Vanderbes (1980) qui sera mis en avant lors de cette séance Lune Noire, spéciale, forcément. Pour s’en convaincre, il suffit simplement de faire l’inventaire, même partiel, des séquences alignées par ce long-métrage qui ne recule devant rien. Vous ne me croyez pas ? Très bien, si vous le prenez comme ça, alignons les pièces à conviction …
Dans L’Amérique interdite, il y a des lupanars pour chiens, des nonnes karatékas, des buveurs de vers de terre écrabouillés. Des combats de boxe topless, une Église de la Poudre Pure dirigée par un millionnaire camé jusqu’au trognon, ou encore ce cher Jello Biafra candidat détonant à la mairie de San Francisco. Le film pousse même le graveleux jusqu’à insérer des images prétendument volées (en fait, montées de toutes pièces) d’une condamnation à mort sur la chaise électrique.
Voilà qui explose sans forcer les compteurs du Kamoulox et du zapping Spi0n réunis. Et encore, on ne saurait tout vous révéler. Pour découvrir le reste, il faudra vous pointer sous les voûtes du Cinéma Utopia. Mais ça vaudra largement le détour ; il y aura de quoi en faire, des belles photos, avec vos tronches ébahies, bouches bées et yeux en billes de loto. Promis, on ne vous taguera pas dessus.
Lune Noire : L’Amérique Interdite, le jeudi 15 novembre au Cinéma Utopia, à 21h. Projection précédée d’une conférence de Sébastien Gayraud et Maxime Lachaud, entrée libre, à 20h