Sophia Antipolis est un drôle d’endroit. A la fois utopie industrielle sortie de terre en banlieue de Nice à la fois des années 70 et ville semi-fantôme.
Une technopole qui s’est rêvée équivalent français de la Silicon Valley mais où l’on croise surtout le silicone dans les implants mammaires. Il y a quelque chose d’une mythologie moderne dans ce type de coin, reliant (rien que par son nom) les récits grecs et le mal-être contemporain comme mode de vie banalisé. C’est ce que filme Virgil Vernier dans ce portrait choral et fragmentaire. Des gamines qui veulent se faire refaire les seins, une veuve asiatique qui se réfugie par ennui dans un mouvement néo-religieux façon Scientologie ou un jeune type qui intègre une société de sécurité aux airs de milice. Tous réunis sans le savoir par un fait-divers un peu plus atroce que d’habitude.
Comme souvent chez Vernier (Orléans, Mercuriales…) le vrai tourne autour du faux, le documentaire avec la fiction. Sans doute parce que c’est un des rares réalisateurs qui reste interloqué devant les faux-semblants de nos vies, les pleins que l’on cherche pour remplir les vides existentiels. Sophia Antipolis était le territoire le plus adapté à ce cinéma, en étant particulièrement concret par son architecture imposante mais en fait totalement artificiel. Vernier le propulse sur un fascinant terrain entre étrangeté du fantastique et constat socio-politique. Le plus troublant restant le désarroi d’un film aussi perdu que ses « personnages », entre catastrophisme face à la paranoïa sécuritaire désormais insinuée partout et malgré tout espoir de sortir d’une fragilité psychologique généralisée. Proche des prophétiques et déclinistes visions urbaines d’un J.G Ballard (IGH, Super-Cannes…) Sophia Antipolis ou le portrait sans fard de notre époque, à la hauteur de ses profonds malaises.
A.M
En salle le 31 octobre. Rendez-vous sur le facebook Nova Aime pour tenter de gagner des places !