Durant les prochaines semaines, en attendant leur réouverture, Nova donne la parole aux salles de spectacle et festivals amis de la radio.
Nous vous proposons un petit tour de France de ces structures qui font bouger activement la culture dans leurs régions. Ce sont nos partenaires et camarades que nous vous présentons aux six coins de l’hexagone. Qui sont-ils ? Que défendent-ils ? Quel est le dernier événement qui les a marqué et quels sont leurs espoirs pour 2021 ? Ils passent tou.t.es par notre petit questionnaire de rentrée.
Aujourd’hui, c’est au tour de l’Embobineuse, salle de musique expérimentale au beau milieu du quartier de la Belle de Mai à Marseille, de répondre à notre questionnaire.
Racontez-nous l’histoire de la salle. Quelle est sa philosophie / son identité
IL ÉTAIT UNE FOIS… an de Crasse 1944. Une bombe américaine tombée du ciel perfore le paysage… Une trouée dans le réel… La bombe accueille ensuite en son trou une activité de bobinage électrique, patiente sous cette jachère ouvrière au bien-bon terreau d’usine. L’activité cesse… En 2002 la bombe renaît de ses cendres, germe et s’étire dans un quartier hanté par ses fantômes industriels.
L’Embobineuse est née. Autoproclamée « Théâtre de Fortune », elle s’élance dans la frénésie de ses choix de programmation expérimentaux et novateurs, se fait un nom et se tentacule un réseau… L’Embobineuse, c’est d’abord une salle de concert, spécialisée dans la musique actuelle, mais aussi une salle de spectacles axée sur l’art en général. Elle se situe au cœur d’un quartier prioritaire de Marseille, La Belle de Mai. Pôle culturel, l’association contribue à la création et à la consolidation d’un tissu social, créatif, artistique et professionnel dans le domaine du spectacle vivant.
Au-delà de sa programmation, l’Embobineuse fonctionne comme un laboratoire de création artistique et de recherche tant dans le domaine économique, sociale, organisationnel, qu’artistique. Elle affirme sa démarche de fonctionnement en tant que structure d’économie alternative. L’Embobineuse mêle les publics, dont certains sont empêchés, des acteurs professionnels et des bénévoles. Elle permet la visibilité des minorités et des diversités culturelles. Elle travaille dans le sens d’une préservation de la culture comme un bien commun où la différence est une richesse. Elle favorise l’accès à l’art et à la culture pour tous les publics grâce à la diffusion, la production, mais aussi à des actions participatives entre les publics et les acteurs du milieu artistique et culturel. Elle favorise la création et la diffusion musicale, artistique, l’emploi des artistes, des acteurs de la culture, ainsi que des personnes plus fragilisées dans leurs parcours de vie et professionnels.
Après de nombreuses années de travail, l’Embobineuse est devenue une référence en termes de musiques indépendantes et expérimentales mais aussi d’actions artistiques innovantes, à Marseille, en Région Sud Provence Alpes Côtes d’Azur, en France, ainsi qu’à l’international. L’équipe travaille actuellement sur quatre axes : la diffusion et la production; l’accompagnement artistique; les actions culturelles; le développement et la consolidation des réseaux culturels et artistiques.
Quelle est votre couleur musicale / ligne artistique ?
L’esthétique principale de la salle englobe les musiques expérimentales et dites de niches dans leur définition la plus large. Soit une approche avant-gardiste des catégories musicales tant populaires que savantes, qui comprend la musique électroacoustique, la musique improvisée, les nouvelles lutheries, l’art brut et les avant-gardes de tous horizons, rocks, jazz, indus, expé, traditionnelles, électronique…
Très attentif à la scène musicale actuelle, ouvert sur des champs artistiques plus larges et des actions protéiformes, du local à l’international, le collège de programmation est exigeant dans ses choix artistiques.
Les créations, les actions, les productions et les diffusions Embobinesques peuvent être hybrides et polymorphes. En effet, le théâtre, les installations multi-médias, les réalisations performatives… et depuis peu, un projet d’émission musicale numérique du type « show télévisuel DIY » trouvent leurs places dans ce temple underground.
Un des derniers événements / concerts programmés qui vous a tout particulièrement marqué.
Il relève toujours un peu du crève-cœur d’avoir à sélectionner quelques artistes à l’exclusion de tant d’autres au milieu d’un tel foisonnement de talents et d’esthétiques, mais si nous devions nous plier à cet exercice éculé, disons que nous retiendrions particulièrement:
La country intimiste et décalée d’ Eugene Chadbourne, précurseur de l’improvisation libre au banjo, la Math-Pop fraîche et classieuse des jeunes pousses londoniennes dans le vent « Black Midi », venus présenter leur tout premier album « Schlagenheim ». Les infatigables vétérans de la scène No-Wave New-Yorkaise The Flying Luttenbachers, venus présenter leur 20ème album « Imminent Death ». Le métal avant-gardiste d’Imperial Triumphant et leur show visuel délicieusement décadent inspiré du Metropolis de Fritz Lang, à l’occasion de leur première tournée européenne, ou encore le savant mélange de Breakcore et de Dark-Ambient du DJ et producteur allemand Christoph de Babalon, invité lors du festival RIAM
Et puis aussi que 2019, c’était l’anniversaire des 15 ans de L’Embobineuse et de sa petite sœur jumelle, l’alternative médiathèque DATA: deux jours de concerts, performances et jeux en tous genres avec en MC le Lemmy Kilmister du violoncelle, le Rostropovitch du Pogo belge, j’ai nommé le désormais légendaire Mr Marcaille.
Tout ceci sans oublier les excellents Neige Morte, Ni, Voogt, Sourdurent, Les Morts vont bien, Death to Mankind, Child Abuse, Bryan Magic Tears,Hippie Diktat et tant d’autres …
Quelles sont vos projets / concerts / festivals / envies / utopies pour 2021 ?
Tout d’abord prolonger l’expérience de L’Essoreuse, notre programme de rinçage audiovisuel d’avant-garde, afin que ce qui naquit du covid lui survive ! Puis ensuite reprogrammer les concerts dont les décrets d’annulation générale des relations sociales nous ont spoliés: Psychic Graveyard, Esmerine,Zeus!, GNOD, Fleuves Noirs, Aluk Todolo… les festivals Vendetta, MUFF, Enfin Seule et autres MIMI… Et de manière plus utopique, nous aimerions pouvoir enfin faire découvrir en live quelques groupes de l’incroyablement fertile label underground Ougandais Nyege Nyege Tapes et tout particulièrement le Hip-Hop Extrême de Duma…
Et puis aussi Lingua Ignota, Author & Punisher, The Armed, accueillir la toute nouvelle création de PoiL avec l’artiste japonaise Junko Ueda…
Et puis je suis à court de cerveau et de superlatifs là, je vais me coucher on verra la suite demain…
Le Cadeau ! Le Cadeau !
Une Sérigraphie tout droit sortie du Dernier Cri, la maison de micro-édition subversive gérée par le Grand Pakito Bolino à Marseille.
Pour jouer c’est —> ICI