Ce matin on célèbre un disque qui est de ceux autour desquels s’articulent un avant et un après. Puisqu’on souffle aujourd’hui les 31 bougies du premier album de Massive Attack, l’inoubliable « Blue Lines » sorti un 8 avril 1991.
Ce disque, que vous avez sans doute écouté des dizaines de fois, est un album monumental. Au sens où il raconte une époque, une génération, un contexte, une ville et une jeunesse. Et pourtant sa sortie elle sonne comme la fin d’une histoire musicale, un postmodernisme où l’on doit désormais accepter que le futur de la musique s’écrira à partir des ruines du passé. C’est à peu près ce que dit le journaliste JD Beauvallet dans les Inrocks, lui qui est sans doute le plus grand connaisseur du groupe et qui a consacré un sacré papier à ce sujet.
À l’époque, on commence à comprendre que des révolutions musicales, il n’y en aura plus vraiment. En tout cas pas du niveau du rock, du rap et de la house qui ont tout chamboulé. Ce que postule Massive Attack c’est que désormais il va falloir composer avec des textures, des souvenirs, des samples et recréer à partir de ce qui a déjà vécu.
Mais ce n’est pas grave parce que dans cet exercice on peut trouver une grande liberté et s’épanouir. C’est en tout cas ce que fait cette bande de Bristol, faite de jeunes qui sont amis depuis les années 80. Qui se sont croisés chez des disquaires ou dans des sound systems et qui sont devenus les icônes de la ville parce qu’ils sont ultra cools et branchés.
Un disque inclassable
Reste qu’ils vont prendre longtemps à enregistrer ce premier album, près d’un an. Une année pendant laquelle ils vont devoir s’ajuster, discuter, s’engueuler, faire une pause le temps de regarder les matchs de la coupe du monde de 1990. Eux qui ont écouté des milliers de disques chacun et qui doivent trouver comment composer avec cette somme. Comment se faire aussi un chemin. Finalement après énormément de boulot, ils y arrivent et sortent un disque qui est un ovni, un inclassable. Ça sonne comme du dub, du hip hop, de la musique électronique, de la pop. Ça sent la fumée, c’est lent, c’est lascif, très sexy et insolent aussi.
C’est une claque ! Pour Bristol qui a son disque générationnel, pour l’Angleterre qui le nommera meilleur album de tous les temps en 1997. Et pour le monde entier qui comprend ce que le terme trip hop va signifier dans leur vie.
Dans le lot des morceaux emblématiques qu’il contient, je pense qu’un « Unfinished Sympathy » met bien à l’envers dès le matin.
Visuel © Pochette « Blue Lines » de Massive Attack