La revue de presse de Marie Misset du 15 décembre.
Tous les matins dans Plus Près De Toi, Marie Misset fait sa revue de presse. Et tous les matins également, on la retrouve désormais aussi en ligne sur Novaplanet, cette revue de presse, écrite en ligne comme elle est dite à l’antenne.
Dans l’édito qui ouvre les pages éco et entreprises du monde, Isabelle Chaperon cite la fable du scorpion et de la grenouille.
Bon je vous la fait courte : les deux animaux sont coincés d’un côté d’une rive. Le scorpion propose à la la grenouille de la guider si elle accepte de le prendre sur son dos. Pas folle, la grenouille se méfie, mais elle n’a pas vraiment le choix, elle le prend sur son dos.
Résultat, ce qui devait arriver arriva : le scorpion pique la grenouille et ils se noient tous les deux. Avant leur dernier glouglou, la grenouille demande au scorpion : « Mais pourquoi, pourquoi ?? » et il lui répond, penaud : « parce que c’est ma nature. » Ça dit peu de choses sur les pages éco et entreprise du Monde mais ça en dit pas mal sur la vision de l’homme de Jean de La Fontaine, pour qui, espérer de changer sa nature, c’est ridicule.
Dans un registre plus positif, heureusement qu’il y a des gens qui pensent que l’homme, la femme, le chien – peut-être pas le chien – peuvent changer. C‘est le cas de Sylvie Nordheim, dont le portrait est étalé dans la Croix. Elle présentait en novembre, sa nouvelle pièce au théâtre national de l’Odéon. Parmi ses acteurs, 3 sont des détenus, des condamnés. On les distingue facilement, lit-on dans la Croix, « ils ont l’air plus perdus. Plus émus aussi. »
Elle-même a eu un parcours chaotique, fait des fugues à répétition jusqu’à faire l’objet d’une recherche Interpol, d’où son envie d’aider, quand elle était prof, « les élèves récalcitrants, les incompris, ceux qui ne sont pas dans le moule, ceux qu’on voue à l’échec » et puis plus tard avec les prisonniers. Elle les écoute, et réussit pendant les ateliers de theatre à leur faire retirer « le costume taillé par d’autres ».
À la fin de la représentation à l’Odéon, le père d’un des détenus est venu la voir, il avait coupé les ponts avec son fils pendant des années, il lui a dit « ce soir, vous m’avez rendu mon fils. »
Ce qui pourrait nous pousser plus loin dans cette réflexion sur la nature de l’homme. Le fils était-il quelqu’un avant de devenir quelqu’un d’autre, retrouve-t-il en fait sa nature, un temps ? Vaste débat que je laisse à vos feux de cheminée…
Pour rester dans cette thématique, on peut lire dans la revue, L‘Entretien, qui compile des entretiens de Laure Adler, celui avec Dounia Bouzar, spécialiste auto-proclamée, écoutée, parfois décriée, de la déradicalisation. Elle rencontre les radicalisés dans des lieux toujours nouveaux, les prend par surprise, leur fait rencontrer d’anciens repentis, Rachid Benyettou par exemple qu’on a présenté comme l’un des chefs de la filière des Buttes-Chaumont.
Elle parle de ceux qui sont revenus, qui seront stigmatisés à vie, déclare qu’il « faut laisser un espace aux repentis sinon ils en crèvent » et finit par dire : « pourquoi est ce qu’on m’a donné de l’argent pour déradicaliser les gens d’un côté si on estime que les gens ne changent pas, et que les terroristes un jour, le seront toujours ? »
David Thomson que vous avez reçu lundi dans l’émission qui a écrit un livre sur ceux qui reviennent de Syrie, de Daech, les revenants, avait une réponse toute trouvée pour Dounia Bouzar. Si l’État lui donne de l’argent, c’est pour donner l’impression qu’il fait quelque chose…
Et puis parfois on a beau changé, le passé revient, comme un gros boomerang. Le boomerang en question est dans Le Monde. C’est le cas de l’ex-espion français Alain Mafart condamné à 10 ans de prison par la justice néo-zélandaise dans l’affaire du Rainbow Warrior. Lorsque le bateau de Greenpeace coule, attaqué par les services secrets français, un photographe militant meurt.
Or Alain Mafart, qui a commencé une seconde vie, est devenu, tiens donc, photographe animalier et sera peut-être récompensé par le musée d’Histoire Naturelle de Londres comme photographe animalier de l’année. Autant dire que ça fait rugir Greenpeace.
On a certes le droits de changer, mais les autres ont aussi le droit de se souvenir.