Nous apprenons avec chagrin la mort du ténébreux chanteur-parolier de Poni Hoax. Fin avril, ce Roi-Lézard des désarrois sentimentaux grimpait à bord de « L’Arche de Nova » pour nous confier ce message d’avenir dont le titre résonne, en cette heure malheureuse, très étrangement. Pensées pour ses proches.
« Entre dans la lumière noire. » Enter The Black Light. C’était l’un des meilleurs moments d’Empire, second album né du mariage musical improbable entre Arielle Dombasle et Nicolas Ker, sorti en juin 2020. Une ballade lugubre, totale Doors, où la voix profonde et légèrement cassée du chanteur de Poni Hoax se demandait, sous la lune, en duo avec l’extravagante diva rohmerienne, si « l’information a une fonction ». Peut-être faut-il entendre, dans ces paroles cryptiques, la perplexité du genre humain à tirer des leçons de ses erreurs innombrables. La lumière noire serait alors la couleur du futur : flippante. Dans le clip de la dernière chanson du disque, We bleed for the ocean, des sirènes crèvent étouffées par les détritus plastiques, prisonnières de filets de pêche abandonnés. Mais Nicolas Ker, sous ses lunettes fumées, n’a-t-il pas répété plus tôt, lors d’une autre complainte goth-rock marquée par les Murder Ballads romantiques de l’Australien Nick Cave, que nous ne sommes « pas obligés de nous noyer, pas obligés de mourir » ?
Optimiste ? Kerrement. Né à Phnom-Penh en 1970 d’un père français et d’une mère cambodgienne ayant fui les Khmers rouges, le crooner cuir, qui vécut au Caire, à Istanbul, à La Réunion ou à La Courneuve, le dit franchement : « Je ne suis pas inquiet. » À bord de L’Arche de Nova, ce Roi-Lézard des désarrois sentimentaux, qu’on dit passionné par la physique quantique ou la théorie des cordes, confie sa fascination pour la nano-médecine qui pourrait nous permettre de vivre cinq siècles. Il esquisse aussi un modèle pour une plus juste répartition des richesses, un « revenu minimum humain, pour se loger et se nourrir, en vivant raisonnablement, voire comme des rois – si on était un peu moins stupides ». « Sinon, ce sera sanglant. »
Réalisation : Mathieu Boudon
Pour voir la vidéo de Deconstruction of the Bride, réalisée par Arielle Dombasle, c’est ici : https://www.youtube.com/watch?v=6skv7vRPy_Y&ab_channel=arielledombasleVEVO
Image : L’étrange histoire de Benjamin Button, de David Fincher (2008).