Soutien de Trump, le site d’extrême droite entend bien faire gagner Marine Le Pen.
C’est raté pour Breitbart.fr. Le site d’extrême droite américain Breitbart, qui a largement oeuvré à l’élection de Donald Trump s’empressait d’annoncer, après l’élection du milliardaire, vouloir s’implanter en France et en Allemagne en vue des prochaines présidentielles.
Le 9 novembre dernier, au lendemain de l’élection de Trump, Reuters rapportait l’expansion prochaine de Breitbart, annoncée par son rédacteur en chef. “Breitbart s’apprête à lancer des sites en Allemagne et en France, alors que le site cherche à monétiser la colère et le sentiment anti-migrants déchaînés par l’élection de Donald Trump”, analysait alors l’agence de presse.
Autant dire que ce n’est pas gagné en ce qui concerne la France. Un petit malin vient d’acheter le nom de domaine Breitbart.fr et squatte l’URL pour éviter l’implantation du site en France. (Une blague assez répandue puisque quelqu’un vient d’acheter les noms de domaine baroin2017.fr, wauquiez2017.fr et Bertrand2017.fr en vue de l’éviction prochaine du candidat Fillon).
Comme le rapporte The Verge, cet étudiant de 22 ans qui se fait appeler “Antonin” a acheté le nom de domaine à la suite de cette déclaration. “Quand j’ai vu qu’ils voulaient lancer une version française du site, j’ai pris peur, parce que j’ai réalisé que ça pouvait vraiment marcher”, explique-t-il. En conséquence, il a décidé d’acheter les domaines breitbart.fr, breitbartnews.fr et breitbartnewsnetwork.fr. Histoire d’être sûr.
Pourtant, les rédactions basées à Jérusalem et à Londres du site répondent aux URL breitbart.com/jerusalem et /London, et il est fort possible qu’il en soit de même avec Paris. Pour l’instant, Breitbart n’a pas souhaité s’exprimer sur le sujet.
Introducing Steve Bannon
Antonin aurait désormais pour projet de rediriger les visiteurs de ces sites vers des sites qui mènent un combat contre le racisme et l’antisémitisme. Le geste est fort, alors que les sites d’extrême-droite ont une visibilité sans précédent depuis la campagne présidentielle américaine. Ils ont même investi le pouvoir depuis que Steve Bannon, fondateur de Breitbart, est devenu directeur de campagne puis l’un des conseillers majeurs de Donald Trump.
I wonder what Steve Bannon will eventually get locked up for? Feel free to send predictions.
— John Iadarola (@johniadarola) 1 février 2017
On murmure à Washington qu’il serait derrière les récents et premiers décrets de Donald Trump. Il a notamment supervisé le récent #MuslimBan. Certains poussent d’ailleurs la théorie jusqu’à l’idée qu’il pourrait exercer, dans l’ombre de Donald, le rôle de président. Entre ces deux hommes bedonnants, odieux, ayant dépassé les soixante ans, et opté pour une coupe de cheveux douteuse, on ne sait plus lequel est le plus flippant.
Breitbart, un concentré d’amour et de tolérance
Breitbart, le bébé de Bannon, est en tous cas l’archétype du site d’extrême droite, mêlant racisme, complotisme et nationalisme. Souvent décrit comme “conservateur” ou par le mignonnet qualificatif “alt-right” website (site de la “droite alternative”), de notre point de vue Breitbart est plutôt ce qu’on appellerait communément un torchon. Un concentré de haine qui cherche à faire de l’argent en nourrissant les peurs d’un lectorat prompt à se tourner vers le complot, la misogynie, l’islamophobie et l’antisémitisme (entre autres belles valeurs humanistes).
Tous les extrêmes se retrouvent sur le site, comparable à un Fdesouche en France, à tel point qu’une récente enquête menée par The Intercept démontre comment Breitbart arrive à réunir des rédacteurs issus de l’extrême-droite israélienne et des lecteurs antisémites sur une même plateforme “d’information”.
Breitbart est en effet bien plus évolué que Fdesouche et consorts, qui se contentent en général d’agréger des news récoltées sur le web. Comme l’analyse pour The Verge David Doucet, journaliste aux Inrocks et auteur de La Fachosphère (Flammarion), l’arrivée de Breitbart dans le paysage médiatique pourrait faire grimper d’un cran la crédibilité de ce genre de sites : “L’implantation d’un site professionnel, disposant de moyens comparables à ceux d’un média traditionnel, pourrait complètement changer la donne.”
(Capture d’écran Buzzfeed)
Ce qui est sûr, c’est que supporters et trolls de l’extrême droite américaine ont bien compris qu’ils avaient des cartes à jouer en France. Une récente enquête de Buzzfeed démontre comment les trolls pro-Trump s’engagent dans une campagne pour soutenir Marine Le Pen. Entre fake news, sites d’extrême droite et trolls organisés, autant dire que 2017 se joue d’abord sur le web.