« En direct » de Rome et d’une Villa Médicis peuplée de volatiles impromptus, ce poète nous propose un pitch possible pour le monde de demain matin.
« Est-ce que le tamanoir déterre lui-même dix mille fourmis par jour derrière sa cage ? * Le seul journaliste qui m’interviewe a l’air plus fou que moi. » Pour Les Plaies d’Occident, son dernier livre publié ce printemps aux éditions Au Diable Vauvert, Félix Jousserand a noté, chaque jour de l’étrange année 2020, ses pensées, par bribes, réduites à l’essentiel, à l’os comme on dit – à l’écoute de son monologue intérieur, de l’actualité géopolitique, économique ou sanitaire, de ses amis, de son éditrice, de la radio. Florilège : « Nouvel an chinois annulé, l’année ne commencera jamais. » « Le week-end pose problème. » « Jouer au con m’a bien aidé mais c’est fini. » « Tempête. Vents violents. Guyotat meurt. » « Si j’étais médecin je tuerais les hypocondriaques. » « La mendiante n’a plus de clients, aux rares passants elle dit que sa carte bleue vient de « se faire avaler ». »
Pionnier de la scène slam française des années 2000 (à propos de laquelle il écrivit une anthologie, intitulée Blah) avec le collectif Spoke Orkestra, auteur de nombreux recueils de poésie, de pièces de théâtre ou d’albums musicaux, ce Parisien de 43 ans, qui vit désormais à Montpellier, nous appelle de Rome. Pensionnaire de la prestigieuse Villa Médicis pour la saison 2020-2021, Félix Jousserand y écrit en ce moment « un oratorio découpé en cinq pièces de poésie, de cinq actes chacune, en vers mesurés, retraçant les grandes heures de la dynastie des Antonins, suivant le règne des cinq empereurs qui conduisirent l’Empire romain à son apogée avant d’accompagner sa chute : Trajan, Hadrien, Antonin, Marc-Aurèle et Commode ». Entre deux séances de travail, il nous propose un pitch possible pour le monde de demain matin, en compagnie d’oiseaux.
Réalisation : Mathieu Boudon.
Image : Junon et le paon, d’Alfred Hitchcock (1930).