Dans un livre d’entretien baptisé « Tout tremble », cette écrivaine parisienne, chanteuse et danseuse du groupe Catastrophe, aligne des idées pour un monde « plus sensible, sans se laisser aliéner par le pouvoir, l’argent, la technique ».
« Dans un monde qu’on dit sans espoir, nous essayons de rester malicieux (…) De ne pas laisser la sidération gagner la partie. De déjouer la fatalité, mais avant tout celle qu’on éprouve en soi-même. C’est en ce sens, mathématique, que nous sommes positifs. » Dans un livre d’entretien baptisé Tout tremble, co-écrit avec le journaliste Jean-Marie Durand et publié ce printemps par les Presses Universitaires de France, Blandine Rinkel confie sa peur d’une « massification » de la bêtise, « celle qui consiste à répéter mécaniquement des choses qu’on n’a pas comprises ». L’autrice parisienne de 30 ans admet bien entendu qu’il lui arrive –comme nous tous – de tirer des conclusions de la simple lecture du titre d’un article, de répéter des opinions toutes faites, « des insultes ou des indignations », « d’imiter, de jouer à, de mentir parfois », comme la narratrice de son dernier roman en date, Le Nom secret des choses (Fayard, 2019).
À moins d’un an des élections présidentielles, la parolière, chanteuse et danseuse du groupe Catastrophe s’effraie de cette attitude (« qui gagne du terrain ») consistant à « abdiquer toute personnalité » en se ralliant « à une même formule, à un même cliché ». Ces comportements moutonniers lui rappellent aussi le brillant film d’animation de l’Américain Charlie Kaufman, Anomalisa, dans lequel, dit-elle, « un homme est si sclérosé par l’aspect mécanique de sa vie que pour lui tous les humains ont exactement le même timbre de voix. Jusqu’à ce qu’il rencontre quelqu’un – une autre voix – pour la première fois. » Dans ses lectures adolescentes, Blandine Rinkel a entendu « des aveux d’imperfection, des refus de n’engager que des relations de pouvoir » et la leçon fut la suivante : savoir dire je ne sais pas, assumer sa vulnérabilité, développer une pensée propre.
« La jeunesse n’a d’autre choix que la responsabilité. » Tandis que Catastrophe repart enfinen tournée à l’affiche notable ce jeudi 10 juin du festival des Inrocks à l’Olympia avec La Femme et les Hollandais turcophiles d’Altin Gün, sa meneuse de revue énumère à bord de L’Arche de Nova des propositions pour un monde « plus sensible, sans se laisser aliéner par le pouvoir, l’argent, la technique (…) où cultiver sa conscience, son imagination, serait considéré comme souhaitable. » C’est sur ces mots, quasiment, que se conclut Tout tremble.
Réalisation : Mathieu Boudon.
Catastrophe jouera Gong ! et autres surprises ce mercredi 9 juin à Rennes, le 15 à Saint-Brieuc, le 18 à Marseille, le 26 à Mayenne ainsi qu’un peu partout en France jusqu’à mi-novembre.
Image : Anomalisa, de Charlie Kaufman (2015).