Actualités propres ?
Avec cette trilogie, que l’impudent Bach Films ressort, on se retrouve plongé en plein paradoxe. Un immense cinéaste, moraliste et religieux – Roberto Rossellini– qui se voit commander des films de guerre, en plein fascisme !
Films de guerre pour cinéaste moraliste
Le résultat est un entre-deux, comme des documents de guerre propres, avec une touche italienne, « villegiatura », une guerre en voyage, avec un doigt de tourisme et un soupçon d’amour… À distance des champs de bataille.
Mais l’Italie n’a-t-elle jamais cessé de produire des œuvres ambiguës, où le ridicule côtoie le drame, surtout au spectacle ? Ici, ce serait « guerre, amour et visites guidées ». Car, trop intelligent pour faire de la propagande à Mussolini ou à l’armée, Rossellini se concentre sur les plans, les axes et aussi les détails documentaires.
Celui qui sera l’un des pères de la modernité au cinéma nous montre avec la meilleure technique possible (et peu de moyens, à part le matériel militaire) l’action qui va broyer les hommes, les matricules.
Quand on réalise qu’après ces trois documentaires, il fera Rome ville ouverte, Paisa, Allemagne année zéro, Strombol (avec Ingrid Bergman), Saint François d’Assise, et tant d’autres films classiques, allant de l’après-guerre au néoréalisme, puis une inspiration quasi–religieuse, pour finir sa carrière avec des mises en scènes historiques pour la télé « éducative », qui fut une de ses dernières grandes idées…
Acteurs & vrais gens
Son talent d’imagier et sa passion pour les hommes se sentent déjà dans ces plans froids et pros de la guerre en images. films de commande où l’on assiste, comme derrière une vitrine, à l’action de réels bombardiers, cuirassiers et autres mastodontes.
Rossellini choisira toujours le réel, les vrais gens : autour de quelques acteurs, de vrais soldats en uniforme semblent être devenus figurants de leur vie, ce qui n’est pas fabriqué, puisqu’ils ne peuvent plus choisir leur destin.
Le navire blanc (1941), Un pilote revient. (1942), L’homme à la croix (1943)
De Roberto Rossellini. Distribué par Bach Films, avec Bonus. 3 DVD noir et blanc. Commentaire de Jean A. Gili, spécialiste du ciné italien.