Aujourd’hui dans Vitamine So, une très belle reprise d’Arthur Russell par Peter Broderick.
Alors Sophie, cette fête des régionales à laquelle personne ne se pointe, ça te rappelle quelque chose ?
En tout cas ça me donne envie de jouer un morceau que j’aime beaucoup, mais qui en plus a le mérite de voir les choses autrement. Cette chanson, elle a été composée par Arthur Russell et elle s’appelle « Losing My Taste for The Nightlife » – « Je perds mon goût pour la vie nocturne », pourrait-on (mal) traduire.
Arthur Russell, c’était un compositeur de génie, un homme qui est l’artiste préféré de vos artistes préférés, de Sufjan Stevens, à Chez Damier, en passant par Devendra Banhart, Jose Gonzales, Robyn, les Arcade Fire : tous sont fans de lui.
Lui qui est mort jeune, du Sida, en 1992. Mais qui en quelques années de vie, a réussi à composer des centaines de morceaux qui sont devenus cultes, après sa mort. Il a grandi dans l’Iowa, il y a appris le violoncelle, mais très jeune il a voulu découvrir autre chose – et s’est installé à San Francisco. C’est là qu’il a rencontré Allen Ginsberg, et la beat generation, là qu’il a commencé à travailler sa propre discipline musicale, très libre, très instinctive et extrêmement riche. Et puis il fricote avec les Talking Heads, Bob Dylan, Larry Levan – toute une avant-garde musicale, mais qui va de musiciens de pop, de folk, ou des DJ et producteurs de house et de disco.
Une des forces de Arthur Russell, c’est qu’il n’a lui même jamais choisi sa chapelle musicale, capable de composer des symphonies au violoncelle autant que des hymnes de la teuf.
Parce qu’il était aussi un grand fêtard – adepte du Loft, du Paradise Garage qu’il fréquentait. Sauf qu’un de ses plus beaux morceaux – posthumes – s’appelle « Losing My Taste for the Night Life » – et il raconte que même lui s’est lassé. Il parle de l’errance aussi de celui qui comble quelque chose par la fête, qui ne sait même plus pourquoi il fait la fête.
Mine de rien, quand on poursuit l’analogie entre ces élections boudées qui seraient comme une fête ratée, on peut se demander pourquoi personne n’est venu. Pourquoi tant de gens n’ont pas fait le déplacement. Est-ce que c’est le line up qui ne convainquait pas ? La formule ? La communication en amont qui a échoué ? Est-ce que c’est parce que les gens ont envie d’autre chose ?
Ça vaut le coup de se le demander et d’écouter ce morceau qui dans sa version originale est très poétique mais peut-être trop douce. Voici une reprise, toute aussi belle, signée par Peter Broderick.
Visuel © Peter Broderick & Friends Play Arthur Russell