Pilier de bar, ô génie humain.
Trouvaille rigolote sur le site de Sciences et Avenir.
En se penchant sur l’histoire de l’ivresse, on constate en vérité que cette dernière était bien antérieure à la culture du raisin et du blé. Elle serait même antérieure à l’Homo sapiens.
C’est ce que semble confirmer une étude menée par le généticien Matthew Carrigan, du Santa Fe College (Gainesville, États-Unis). Ce dernier travaille sur une mutation survenue chez l’ancêtre africain des humains et des grands singes, qui s’est mise à métaboliser l’éthanol 40 fois plus vite. La raison de cette mutation génétique, c’est l’assèchement climatique, poussant ces ancêtres à descendre des arbres nourriciers pour se substanter des fruits tombés au sol… Et parfois fermentés. Et il semblerait qu’ils y ait pris goût.
Hypothèse des singes ivres
Seulement, ivresse et escalade en haut des cimes font rarement bon ménage, il a dû fallut, d’où une accélération de la métabolisation de l’alcool. En 2004 déjà, le biologiste californien Robert Dudley avançait « hypothèse des singes ivres », une hypothèse qui ferait que notre espèce serait génétiquement prédisposée à être attirée par l’alcool et sa consommation abusive.
En gros nos ancêtres aimaient déjà se bourrer la gueule et cherchaient les effets de l’alcool. Mais les fruits fermentés ça va bien deux minutes, selon Roger Morse, professeur à l’université Cornell, nos ancêtres se seraient ensuite tournés vers un hydromel naturel, constitué de miel et de cire détrempé par les pluies, permettant l’apparition de levures et d’une fermentation.
En gros vos potes bretons qui s’envoient du Chouchen n’ont pas vraiment été confrontés à l’évolution. Patrick McGovern, professeur d’archéologie biomoléculaire à l’université de Pennsylvanie voit dans le partage de cet hydromel naturel les premières bringues de nos ancêtres. L’arrivée d’un proto-pinard est quant à elle bien plus tardive. L’homme rencontre la vigne en Eurasie, il y a 2 millions d’années, du côté d’Israël et de la Palestine, de l’Anatolie, du Caucase et de l’Iran. Il est en revanche très compliqué de déterminer quand l’homme a commencé à stocker et conserver des breuvages alcoolisés, car sa conservation était très complexe tout comme le contrôle sur le processus de fermentation.
L’alcool, lien social et spirituel
Mais ce qui est intéressant c’est maintenant le rôle conféré à l’alcool et sa production par ces chercheurs. Au-delà du fait que l’ingestion d’éthanol ralentit le métabolisme, facilite la digestion et favorise le stockage des graisses, sa production semble avoir eu des conséquences sociales et de développement physique, comme le rappelle sciences et avenirs, à Tell Bazi, au nord de la Syrie, il y a 3400 ans, chaque maison possédait en effet sa « microbrasserie » et pour l’archéologue allemande Adelheid Otto : « les nutriments essentiels, notamment les vitamines, fournis par la fermentation des céréales ont permis aux Mésopotamiens d’avoir une croissance physique correcte alors que leur régime alimentaire à base de pain et de gruau était déficient« .
Enfin, l’alcool avait aussi une dimension spirituelle, comme l’avance Patrick McGovern : « Communiquer avec les dieux ou les ancêtres implique presque toujours l’usage d’une boisson alcoolisée, que ce soit le vin de l’eucharistie, la bière offerte à la déesse sumérienne Ninkasi, le “grog” viking ou l’élixir des tribus amazoniennes ou africaines. ». Il fonctionne aussi comme un excellent analgésique. En somme l’alcool fait partie prenante de l’évolution des civilisations vers nos sociétés actuelles, avec tous ses côtés sombres aussi, mais que l’on a sans doute pas besoin de vous rappeler.
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