Musique Au Cinéma. Même initiales que « mort aux cons ». Et dans les deux cas, pour reprendre l’exclamation d’un galonné ayant eu son heure de gloire sur quelques ondes britanniques, le programme est vaste. Pour celui plus artistique qui nous concerne en premier lieu, il faudrait une vie pour développer, creuser, détailler, aborder ne fut ce qu’un dixième des discours et des méthodes : bandes originales, comédies musicales, bruitages post-synchro, biopics, caméos, lives mis sur pellicule, fictions sur des groupes inventés, etc.
Depuis sept ans, le festival bordelais Musical Écran a choisi une autre focale encore : se dédier à la forme documentaire. Pour cette nouvelle édition, ce sont 30 films, projetés au Cinéma Utopia (mais pas seulement, également à la Bibliothèque Mériadeck ou à la Salle des Fêtes du Grand-Parc, aussi) qui formeront un vibrant éventail de sons et d’images pour mieux élargir ses horizons, fortifier ses goûts et se frotter à l’inconnu. Petit aperçu, au son du « Flashback (Laboratoire Mix) ».
D’Idles à la rumba congolaise, du hip-hop marseillais au Sleep de Max Richter, de l’énigme folk Connie Converse aux coulisses de l’Eurovision, du tropicalisme brésilien 60s aux carnavals de la Nouvelle-Orléans, de Dinosaur Jr aux pionnières électroniques (Éliane Radigue, Suzanne Ciani, Delia Derbyshire et autres sisters with transistors narrées par Laurie Anderson) en passant par Fanny, l’underground jazz libanais, Rachid Taha ou les Têtes Brûlées afrofuturistes filmés par Claire Denis, les transversales seront nombreuses, faisant répondre aux coordonnées connues des points à découvrir ou à approfondir. Pour ne pas mourir idiot ? Mieux : pour vivre intelligemment. Et cultiver son jardin, en y faisant pousser des gerbes de son.
Une semaine ciné-musicale à la programmation fureteuse, curieuse de tout, résistante à la normalité, qui s’ouvrira sous des auspices électroniques, avec le métrage Off the Records, de Gabin Rivoire. Un film (dont le réalisateur nous avait causé dans le poste, ici-même) qui s’est attaché à suivre la tournée mondiale 2017-2018 de Laurent Garnier, et qui en profite pour retracer le parcours de cette figure incontournable, tutélaire, de la techno hexagonale. La Hacienda, où il mixait sous le nom de DJ Pedro ? Il en sera question. Ed Banger, également. Et aussi par les raves, le Rex Club, la French Touch, son festival Yeah à Lourmarin ou encore la radio (FG, Meuh, Fuck You FM à Ibiza, ou encore – vous nous voyez venir – Radio Nova, où Garnier a œuvré pendant plus de dix ans) …
À noter que Gabin Rivoire et Laurent Garnier seront présents pour présenter ce film qui donnera un « la » éclatant à cette édition 2021.
N’oublions pas, mardi, In a Silence Way, le film auquel Nova Bordeaux vous invite en bas de cet article. Un métrage dédié à l’énigmatique figure de Mark Hollis, leader de Talk Talk, qui à la manière d’un Scott Walker, d’un Joao Gilberto, Salinger ou Jim Carrey, a décidé peu à peu de disparaître, de se retirer du monde et du bruissement social. Hitmaker 80s devenu le pionnier d’un post-rock abstrait, avec Spirit of Eden puis Laughing Stock, jusqu’à l’atonal, jusqu’à l’évanouissement de tous les radars après son dernier solo de 1998.
Parti sur les traces de cette trajectoire fascinante et de son insaisissable capitaine, le réalisateur belge Gwenaël Brees (qui sera présent lors de la projection) compose, avec une inventivité, une obstination et une sincérité jamais démenties, un étonnant journal filmé. Un geste, une quête tantôt burlesque, tantôt songeuse, dans les creux de laquelle Mark Hollis, par son absence même (y compris celle de sa musique, dont l’utilisation n’a pas été accordée), son évanescence, irradie le moindre recoin de la pellicule.
Et si vous désirez pratiquer comme personne l’art du contretemps, vous pourrez aussi toute la semaine apprécier la programmation off du festival, Cour Mably, au coeur du QG Musical Écran. Un tiers-lieu éphémère où il fera bon faire un crochet ou deux, entre projections spéciales, expositions, disquaires pour chiner le vinyle qui manquait à vos étagères, coups à boire, graines à casser, et soirées DJ-sets aussi – psyché (L’Astrodome), indie-rock (Total Heaven), kuduro (Rita Maia), queer (Anne Pauly) ou les mixes toujours détonants et déroutants de la Hollandaise DJ Marcelle, sur trois platines.
Avec tout ça, si vous ne trouvez pas un moment dans la semaine pour aller à Musical Écran, c’est que vous êtes cloué.e au lit, ou que vous entretenez quelques contentieux mal placés. On ne voit pas d’autre explication. Blague à part, c’est aussi le moment de vous rappeler qu’à Nova Bordeaux, on vous a mis quelques tickets de côté, pour le film In a silence way ; des billets qui se chopent EN SUIVANT CE LIEN, via le mot de passe Nova Aime.
Festival Musical Écran #7, du dimanche 5 au dimanche 12 septembre @ Cinéma Utopia, Cour Mably, etc. (Bordeaux).