Plutôt quatre-quarts ou opéra ? Et pourquoi pas les deux ? Si, rayon gâteaux, on pourrait craindre une conséquente montée de sucre, niveau spectacles, la proposition est plus que bienvenue : bien sentie.
Impossible ou presque d’émettre un autre avis à la vue de ces quatre quarts de découvertes chorégraphiques sur la scène de l’Opéra National de Bordeaux ; des initiations et des illuminations chorégraphiques – parmi lesquelles des spectacles tout juste entrés au répertoire de la maison – où Mozart engraine Alexander Ekman, où William Forsythe et Gianni Versace répondent aux Mystères des Voix Bulgares, pour n’évoquer qu’une pincée de noms impliqués.
Au programme, plus précisément – vous êtes là pour ça – on peut mettre en branle les pales de nos moulins descriptifs pour Petite Mort, un ballet créé par le Tchèque Jiri Kylian, l’un des grands maîtres européens de la danse, directeur de compagnie émérite (en Allemagne, en Hollande, etc.) et auteur d’une soixantaine de pièces. Imaginée à l’occasion du 200e anniversaire de la mort de l’Amadeus viennois, dont les concertos pianotés traversent le spectacle, Petite Mort phosphore sur la fameuse dualité d’Eros et de Thanatos, plein d’une énergie néoclassique, de joutes au fleuret et d’entrechats techniques qui mettent la mort, petite comme grande, plaisante ou fatale, sur les capillaires gonflés de nos existences.
Suivront les pas de cinq et de deux élaborés par le multiprimé et très europhile (il fut pendant vingt ans directeur du ballet de Francfort) William Forsythe, éminence de la danse contemporaine qui, avant de collaborer avec un habitué de Nova, James Blake, réalisait Herman Schmerman, sublime tentative de déséquilibrer les limites musicales du corps, de contorsionner les attendus, de varier les formes du ballet classique. Creuser sa propre langue dans la langue, faire émerger un style : « La chorégraphie est un langage, pose Forsythe. Le plus important, c’est la manière dont vous l’utilisez, non ce que vous dites. »
Il y aura aussi Step Lightly, une pièce pour six danseur.ses créée par Sol León et Paul Lightfoot, couple hispano-britannique ayant beaucoup oeuvré aux Pays-Bas (au Nederlans Dans Theater de La Haye, où il n’y a pas que le tribunal) et dont il s’agissait alors du premier travail commun. Avec dans les oreilles les harmonies polyphoniques des Mystères des Voix Bulgares (ce choeur magyar chantant a cappella depuis les années 50 et croisé dernièrement, on vous en parlait ici, chez Para One), Step Lightly illumine la scène, entre poses figées, sculptures de chair s’animant soudain d’une spontanéité vive et sensitive, fidèle à la ligne de conduite esthétique à laquelle León et Lightfoot se tiennent depuis plus de trois décennies.
Enfin, la pièce la plus récente, celle aussi qui implique le plus d’interprètes (seize sur scène) : le Cacti signé par un Suédois aussi doué que polyvalent, Alexander Ekman, à qui l’on doit non seulement l’écriture des mouvements dansés de cette oeuvre mais aussi sa mise en scène et le dessin épuré des costumes, tantôt noirs, tantôt chair. L’histoire ne dit pas s’il fera aussi le placier dans les gradins pour vous placer au mieux afin d’apprécier son spectacle mais, quoi qu’il en soit, qu’importe votre angle de vue – bord de scène ou altitudes d’épervier – il ne faudra pas manquer cette piquante incursion dans un territoire fait de muscles déliés, de blocs anguleux et de xérophytes en pots, sur des musiques d’Haydn, Beethoven ou Schubert.
Pour être au fait de toutes ces tendances, Nova Bordeaux s’est mis en quatre pour vous offrir des places, qui se dégotent EN SUIVANT LE LIEN JUSTE ICI.