Pendant qu’un junkie repentant bataille pour conserver son statut de père, le cinéma de Robert Guédiguian se trouve un remarquable héritier.
Michel a 53 ans et peut-être pas forcément toutes ses dents. Normal, quand on s’est défoncé et qu’on a picolé dès l’adolescence. Michel n’a en fait jamais vraiment quitté cet âge-là. Rebelle un jour, rebelle toujours. Ce serait un crève-cœur pour lui d’abandonner ses t-shirts élimés ou un blouson de cuir aussi usé et buriné que son visage, voire de jacter autrement qu’en verlan façon loulou de banlieue des années 80.
Alors Michel se retrouve coincé entre ses responsabilités de père et de fils, entre ses pulsions de vie et d’autodestruction. Les Héroïques n’a pas besoin d’en raconter beaucoup plus, puisque Michel est un concentré d’histoires à lui tout seul. Michel ou plutôt François Creton, acteur de sa propre vie.
Michel n’a en fait jamais vraiment grandi. C’est d’ailleurs ce que lui reprochent ses proches, de son fils ado à sa femme, avec qui il a récemment eu un bébé. Jusqu’à ce que ça craque, qu’elle décide de s’en séparer. Où que son daron renoue avec lui, alors qu’il crève à petit feu d’une sale maladie.
Les Héroïques n’est pas qu’une fiction, le film de Maxime Roy piochant énormément dans le parcours de Creton tout en fracas social. Il apporte bien plus qu’un visage et un physique ou une vérité à ce récit de la France des ultra-précaires. En touchant grâce à lui au près, au plus juste, un vécu, mais sans en occulter les zones d’ombres, Les Héroïques touche à une honnêteté loin d’être courante dans le cinéma français naturalisto-sociologique. Oui, il est question ici d’une reconstruction, mais avant tout de son processus et de la difficulté de l’accepter. Sans pour non plus sombrer dans le misérabilisme, Creton et Roy s’autorisant parfois à ridiculiser ce perpétuel immature comme à respecter les résurgences de son envie de ne pas rentrer dans le rang.
Forcément ce cinéma-là fera penser à une descendance de celui, solidaire, d’un Robert Guédiguian, renforcée par la présence d’Ariane Ascaride, avec le bonus de ne jamais s’affranchir de la complexité du réel, en filmant ses hauts et ses bas, sans angélisme ni jugement.
En salles le mercredi 20 octobre
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