Demain 5 novembre 2021 à 9h05, des Marseillais et Marseillaises se rassembleront cette année encore, place Homère, à l’intersection des rues d’Aubagne, Jean Roque et du Moustier, à quelques mètres précisément de l’endroit où s’effondrèrent il y a trois ans exactement deux immeubles de la rue d’Aubagne, tuant sous les décombres, Fabien, Simona, Ouloume, Emmanuelle, Chérif, Taher, Niasse, Julien.
Véritable trait d’union entre les quartiers du Vieux-Port ou de Belsunce et ceux du Plateau (Cours Ju, de la Plaine, Notre-Dame du Mont) cette artère a soulevé, révélé en quelques secondes – sinistres secondes – dans un voile épais de poussière, les stigmates d’une politique du logement qui n’avait de politique que le nom, poussant des milliers de marseillais de tous les quartiers à s’interroger passer la stupéfaction, à réagir et à manifester. Cette prise de conscience vaudra au Maire, son fauteuil. « Au revoir et bon débarras », lui ont signifié les électeurs.
Ces effondrements ont aussi conduit de nombreux marseillais hors de leur logement pour cause de péril éminent. Ils seraient au nombre de 5000 aujourd’hui, 500 vivants toujours – seuls ou en famille – dans des chambres d’hôtel, et ce nombre n’a rien de définitif car trois ans après, des immeubles continuer d’être vidés de leurs habitants et cadenassés avant d’hypothétiques travaux.
Appareil au poing, Anthony Micallef a comme tous ses confrères photographes, été dans la poussière. Mais pour lui, très vite l’urgence a été d’accompagner de son regard les délogés, de raconter leur quotidien et les solidarités que cette crise a fait naitre. Avec l’aide du collectif du 5 Novembre et celui de la Fondation Abbé Pierre, il a pu entrer en contact avec les délogés et construire ce projet photographique qui parle de ce qu’est un habitat et de la douleur de le perdre. « Il est question de douleur, d’invisibilisation et, en filigrane de ce représente un foyer dans un vie » explique-t-il. « Certes on habite un logement, mais en le perdant, on réalise soudain à quel point ce logement nous habite. ». Ces photos, expo dans un premier temps accrochée sur les murs de la Mairie centrale par la nouvelle municipalité, ce reportage au cœur du mal logement et de ses conséquences est devenu un livre. Indigne Toit est un témoignage visuel poignant,accompagné de court texte du photographe. En prime, un encarté permet via des flash-codes d’écouter la voix, les mots des personnes qu’il a aussi interviewer. Tous ce témoignages sont à retrouver sur www.indignetoit.com.
Indigne Toit d’Anthony Micallef (André Frère Editions). 27 €