Atlanta, 1999. Trois ans après les Jeux Olympiques (Pérec ! Johnston ! Süleymanoğlu ! Ali à la flamme !), nouvelle secousse au pays de CNN et de Coca-Cola : les Black Lips frappent leurs premières notes. Garage dépenaillé, surf-rock lo-fi, zinzin, bordélique, gerbant en tous sens. Flower punk : l’étiquette fera florès. Et ça ne sera pas de la roupie de sansonnet. Elles les conduiront à se rencarder auprès de l’esprit de la forêt, à compter jusqu’à deux milliards, à filer vers les montagnes d’Arabie ou sous l’arc-en-ciel, à hésiter entre les graffitis de Satan et l’art divin. À chanter, aujourd’hui, dans un monde qui s’effondre. Voilà le parcours qu’on peut leur prêter en suivant à la six-quatre-deux les intitulés de leurs albums.
Mais ça ne dit pas grand-chose, vous en conviendrez, sur ces protégés du label Vice Records. Un groupe qui durant de nombreuses années furent de turbulents spécialistes du boxon électrique, habiles à faire parler la poudre, à cuisiner la foudre, agressive, désintégrante, prête à emplafonner fissa quiconque se placerait sur la trajectoire de ses impulsions.
Le chahut s’est calmé depuis, mais la sensation Black Lips continue à faire un effet boeuf. Depuis quelques années, leur indie-rock peut compter sur la présence capitale de la saxophoniste Zumi Rosow, l’égérie Gucci (eh oui !) n’étant pas la dernière pour souffler dans les bronches des tièdes et des tépides. Et un singulier cheval de bataille : la country.
Avec leurs dégaines invraisemblables de freaks, de figurants recrutés pour le compte d’un western fauché, frappadingo, les Black Lips louchent désormais plus que franchement sur cette americana aux dents cassées et aux guitares bien ficelées. Rien d’un caprice abracadabrant, toutefois. Ni une reconversion sur l’heure, un changement de dégaine à la diable ou une volte-face de girouette au ramage caréné : dès l’aube du millénaire, Cole Alexander et ses collègues s’adonnaient déjà aux plaisirs du genre sur un morceau comme « Sweet Kin ». Ou « Make It ». Ou sur leur reprise de « Mamas Don’t Let Your Babies Grow Up to Be Cowboys », une poignée d’années plus tard.
Jared Swilley, bassiste des Black Lips, l’affirme : « On aime la country. Ça a toujours été un de mes styles de musique préférés. J’ai grandi avec elle. Toute ma famille en joue. Ma grand-mère était une danseuse de sabots. C’était le nord de la Géorgie. Ils étaient tous prédicateurs. Alors, tu sais, la country et le gospel … Mes oncles, tantes et quelques cousins avaient un groupe dans les années 60-70 : The Swilley Family. lls ont enregistré plein de disques. J’ai aussi un grand-oncle au Rockabilly Hall of Fame. »
Une affaire de famille, donc, où ça dialogue à toi et à tu ; une familiarité dont ils ont fait la talentueux étalage sur leur dernier long-format, Sing… in a World That’s Falling Apart, enregistré du côté de Laurel Canyon, qui a inspiré plus d’un.e guitariste. C’est brut de pomme, choral, tantôt crachotant, tantôt glam, tirant le Velvet vers le comptoir du saloon : une esthétique hillbilly avec laquelle s’amuse d’ailleurs l’affiche de leur tournée européenne (Tchèquie, Pologne, Pays-Bas, Suisse, Italie, Espagne, France, etc.), dont cette date bordelaise constitue l’une des dernières stations.
Nova Bordeaux vous offre des places pour ce concert à Barbey, et devinez quoi, ÇA SE PASSE LÀ, ICI, TOUT DE SUITE, si vous avez dans votre trousseau la clé appropriée, celle du Nova Aime.
The Black Lips + Rats on Rafts, le mercredi 1er décembre à 20h30 @ Rock School Barbey (Bordeaux).