Portraits modernes pour icônes définitives ?
Ce new-yorkais, au goût bon chic bon genre, a vite été recruté pour la mode et les magazines glacés de beauté et d’élégance. Irving Penn, beau et racé, au coup d’œil sûr et à la technique parfaite, est entré au Panthéon des photographes. D’ou l’expo, actuellement au Grand Palais.
Cette façon de faire, en Rolleiflex, noir et blanc, en studio, un peu sombre, pour que les ombres noires soient très marquées, sera l’image de marque du portrait « artistique moderne ». Son professeur d’ université d’Art était Alexey Brodovitch, directeur artistique au Harper’s Bazaar, autre temple du bon goût et du chic. Il va s’entraîner dans toute l’Amérique, à saisir des gens du peuple, la rue, jusqu’au Mexique, où Frida Kahlo attirait tous les esthètes branchés.
Al Pacino
Who’s Who mondial
Les plus belles robes de Balenciaga à Dior, puis aussi les grandes personnalités artistiques et culturelles : tous les noms portraiturés par Irving Penn viennent du Who’s Who mondial. Dites n’importe quel réalisateur, peintre, auteur, danseur, acteur, designer, musicien…
De Picasso à Hitchcock, de Joséphine Baker à Miles Davis, de Levi Strauss à John Houston…C’est simple, nous avons tous vu ces portraits devenus classiques, officiels, dans des articles de presse. Les images d’ Irving Penn remontent le niveau de l’article.
Bien sûr, il était simple, discret, très avisé, un œil de Lynx, un art du dosage et un rien de mise en scène. Ni trop, ni évident… Le mystère Penn est celui des grands faiseurs, au-delà de l’habileté, indifférent au génie tapageur. Juste la mesure parfaite de la lumière et une sensibilité haut de gamme, permettent de cliquer à la bonne seconde.
Alfred Hitchcock
Collection de têtes
Ses portraits ont l’air si évident, comme des statues, des tableaux, des instantanés parfaits, des modèles du genre. Pas glamour, plutôt un peu tragiques. Un théâtre du drame sourd de l’humanité épinglée comme une collection de têtes, de bustes définitifs, et pourtant intimes. Un peu tristes, noirs, hors de la mode, du monde, enfermés avec lui dans le studio de prise de vues…(comme Richard Avedon, Cecil Beaton… Rien à dire, c’est parfait).
Miles Davis
En 1971, il est allé photographier des Touaregs au Maroc, comme il avait fait les Mexicains en 1941. Sa femme, Lisa Fonssagrives, en a fait un petit film ou il n’y a rien à voir, à part les Targuis, puisqu’il est si rapide et discret (il a aussi fait des objets, animaux, natures mortes…) Son seul drame est le dessin et la peinture : il s’y est escrimé et cassé les dents. Appuyer sur la détente, et diriger pinceau ou crayon pendant des heures, n’est pas le même univers. Irving Penn, au passage, est le frère d’Arthur Penn (Bonnie and Clyde, Little Big Man, un grand réalisateur de films…Décidément !)
Irving Penn. Galeries nationales du Grand Palais, du 21 septembre 2017 au 29 janvier 2018, une exposition organisée dans le cadre du centenaire de la naissance d’Irving Penn. En partenariat avec le Metropolitan Museum of Art de New York.
Le Corbusier