On dit post-punk mais on pourrait dire « spoken word » ou même « spoken punk ». Quoi qu’il en soit : on vous offre le premier album de ce sensationnel groupe britannique.
C’est l’histoire d’un mec. Jeune et même un peu plus vieux que ça, il se la jouait anti-capitaliste, anti-système, pro-révolution, guévariste / léniniste / bakounien qui veut tout faire péter et rebâtir un monde plus juste sur les cendres de l’ultra-libéralisme qui aminci les fragiles et asservi les masses.
Sauf que, ce mec, il a fini par vieillir (plus vite qu’il ne l’aurait pensé d’ailleurs), et qu’il se retrouve, non pas dans la jungle bolivienne le fusil à la main et les idéaux en auréoles, mais au sein d’un bureau à encaisser le fric parce qu’il faut bien trouver quelque chose à faire – et qu’il y fait globalement moins humide qu’en Bolivie, aussi. Le statut, le salaire, la sécurité, le savoir-vivre. C’est plus sûr.
Les injustices sociales, il les combat toujours, mais en dîner arrosé et bien garni plutôt, avec les copains qui gagnent autant ou moins, peu importe, et avec qui on ne combat plus tellement d’ailleurs. Les rêves, doucement, s’étiolent. Reste plus qu’à s’en souvenir. Ou à les chanter ?
Album-concept
Cette histoire est peut-être la vôtre, ou à-peu-près. C’est aussi l’histoire de ce personnage Fil d’Ariane envisagé par Yard Act pour porter The Overload, ce premier album sorti aujourd’hui et devenu, au fil des morceaux, un album-concept (“lorsque le révolté d’hier s’embourgeoise”, aurait pu s’appeler le disque).
Yard Act, donc. Des Anglais venus de Leeds (Yorkshire, nord de l’Angleterre), portés par deux musiciens (James Smith au chant, Ryan Needham à la basse) qui ont traîné leurs bottes dans les scènes locales et ont décidé de les salir encore un peu. Des intellos de comptoir qui se sont rendus compte, à force de parler musique, politique et arts en tout genre, qu’il y avait peut-être quelque chose de plus probant encore à faire que de s’enfiler des bières jusqu’à ne plus savoir quoi faire de la migraine que l’on traînera derrière.
Les premiers concerts ont eu lieu quelques semaines avant le premier confinement (mauvais timing…), des disques durs avec plein de démos dedans ont grillé (mauvais karma) et pourtant, le groupe, devenu quatuor, représente ce que la scène post-punk britannique (on va dire “post-punk” mais on pourrait dire aussi “spoken-word” voir “spoken-punk”) fait de plus excitant actuellement. On pense à The Falls (ce n’est pas rien), à The Streets, à Fontaine D.C. ou à Sleaford Mods. À des individus qui savent réfléchir et se préoccuper des autres, à ne pas verser dans le pathos, mais à faire preuve d’empathie quand même (le fameux cynisme à l’Anglaise, si cher aux préjugés). Si Ken Loach prenait un micro pour parler chômage et crise sociale, allez savoir, c’est peut-être au son de Yard Act que ressemblerait sa prose.
Baba bow
Baba bow
Sur Nova, vous avez entendu tout l’été ce morceau qui dit “Baba bow / Baba bow” (“Land of the blind”) et qui est accompagné aujourd’hui, avec la sortie de ce premier album, par un tas d’autres titres goinfrés de ce même humour décalé et pince-sans-rire qu’on ne retrouve que de ce côté-ci de la Manche. Du post-punk qui ne tâche pas et qui maîtrise la langue de Mark E. Smith avec une élégance pas si fréquente. Bravo à eux.
Et pour l’occasion, on vous offre des exemplaires de ce premier album.
Rendez-vous ci-dessous et jouez avec le mot de passe que vous trouverez sur notre page Facebook Nova Aime.