Anthologie folle d’un fan de Bowie.
L’Art de mourir de Socrate à David Bowie ! Carrément… 330 pages de citations, d’évocations, d’accumulations de tous les dandys de l’histoire connue, une véritable anthologie monomaniaque autour de l’idée de « dandy », hélas si galvaudée et usée jusqu’à la corde…Pour se pendre ?
Anhtologie monomaniaque
Daniel Salvatore Schiffer, l’auteur (un universitaire liégeois, philo arty) a pris David Bowie comme fil conducteur, et son dernier disque Blackstar, comme une sorte de modèle de fin annoncée, dans le contrôle et l’élégance morbide, grande tradition chic ?
Le clip de « Lazarus », un des titres de l’album, serait une déclinaison moderne des visions gothiques tendance livide, entre Edgar Allan Poe (Histoires Extraordinaires), Barbey d’Aurevilly (Les Diaboliques), Bram Stoker (Dracula), bref du Gustave Moreau, dark rock ?
Ce qui permet à l’essayiste de compiler la tribu « dandy », littéraire, philosophique et même artistique, dans un très gros jeu de cartes des 7 familles, qui indiquerait toutes les tentatives et déclarations des élégants solitaires, de l’Antiquité à nos jours.
« Salade de dandys »
Une sorte d’énorme « salade de dandys », où tous les ingrédients s’ajoutent les uns aux autres, sous la baguette magique de Ziggy Stardust et surtout du Thin White Duke, diaphane et squelettique, une autre des incarnations du maitre Pop Bowie.
En tout cas, les amateurs des petits maitres élégants et méprisants du dandysme international (d’Épicure à Mishima en passant par Brummell, Wilde et Chateaubriand parmi des dizaines d’autres) trouveront un véritable dictionnaire d’artistes, de penseurs, de philosophes en quête de beauté, d’ineffable et de sublime, accompagnés de citations utiles !
Si le dandysme est l’« art du peu », alors ce livre est son opposé : bourré à craquer de tous les petits maîtres du comportement à part, de la négation de la société, de la quête du surnaturel visionnaire et moral, dont – les amateurs le savent – Charles Baudelaire est le pape. Si l’Angleterre du tournant de siècle XVIIIe-XIXe siècle, fut le terreau idéal au développement des cet « art de ne pas vivre », de ce comportement asocial de quelques auteurs, poètes, littérateurs ou aventuriers (Lord Byron, Shelley, Brummell, Oscar Wilde et son emblématique Portrait de Dorian Gray, dandy dissolu, libertin et sadique, dont le portrait vieillit à sa place !), la France n’est pas en reste avec une belle troupe de poètes maudits, d’artistes solitaires, princes exilés par la vie triviale.
« Losers » plus ou moins romantiques
Cette « mode » d’amour pour les dandys, – malgré leur vanité et leur mépris de la société et des convenances -, remonte à un renouveau au XXe siècle pour ce qui est à part, choquant, underground, par les images du cinéma, puis des icônes pop, et bien sûr des « losers » plus ou moins romantiques : les poètes rockers déchus, perdus, ruinés.
La part sadomasochiste de ces « individus », écartés de la foule, leur vaut des fins tragiques, dans la solitude et la misère (Soren Kierkegaard et Frederic Nietzsche, exactement comme Beau Brummell ou Charles Baudelaire etc.), prix à payer pour ceux qui se croient supérieurs ?
Mais comme toute religion ( elle de la beauté physique et de l’élégance morale ?), tout cela ne marche que pour ceux qui y croient…
Traité de la mort sublime. L’art de mourir de Socrate à David Bowie. Par Daniel Salvatore Schiffer. Alma éditeur. 330 pages. 20 euros.
Allez visiter le musée Gustave Moreau à Paris !!! 14 rue La Rochefoucauld, 75009. Des salles entières de toiles représentant des visions idylliques, de nymphes, licornes, cygnes, demi-dieux, apparitions…Par le grand peintre symboliste et mystique, parfait illustrateur de ce courant.
Visuel : (c) Getty Images / The LIFE Picture Collection