Un nouveau magazine sur la culture basketball vient d’arriver.
Avec son nom de blessure à cheville, Entorse embrasse cette mode des revues sportives aux noms décalés, comme Pédale ! (une revue sur le cyclisme) ou Tampon ! (une revue sur le rugby), toutes les deux étant éditées par So Press (groupe qui s’est fait connaître avec son mensuel So Foot).
Un simple regard sur ce grand format (30x38cm), dont la couverture orange et cette « entorse » noire qui la parcourt en mimant le tracé si particulier des « ballons-panier » ne laissent aucun doute : Entorse est un magazine sur le basketball. On imagine que Stéphane Peaucelle-Laurens, à l’initiative du projet, a dû songer à l’appeler cassage de cheville, du nom de l’affront le plus humiliant que puisse subir un basketteur sur un parquet, mais on admettra aisément que cela ne sonne pas très bien.
Figures célèbres et anonymes qui comptent
Au sommaire du premier numéro de ce bi-annuel, un mélange équilibré de papiers sur des figures connues du sport, de portrait d’anonymes qui comptent, de récits de rencontres historiques, et de longs reportages, comme celui à Dakar sur le basket africain.
On y lira même une rencontre avec George Eddy, une voix familière pour tous ceux qui, dans les années 90, veillaient jusqu’à très tard dans la nuit pour suivre les retransmissions des matchs NBA sur Canal +. Une sorte de Thierry Roland du Basket – ce même goût pour les jeux de mots, les blagues limites en moins et l’accent américain en plus. Badaboom Messieurs-Dames ! Entorse est ici et ailleurs, aujourd’hui et hier, partout où l’on joue au basket.
Qu’on le feuillette simplement ou qu’on en lise attentivement les articles, on est à l’évidence davantage en présence d’une revue culturelle sur le basketball que d’une revue sportive à proprement parler. À l’image de ce qu’entreprennent depuis cinq ans la revue Desports et la collection associée ; nous faire lire le sport comme de la littérature. Et parfois même, évoquer les carrières sportives de grands auteurs, comme dans cet essai de Fausto Batella, où l’on découvre que Jack Kerouac aurait pu passer pro en NFL (la ligue dans la ligue de football américain). Des histoires et des humains plus que des statistiques et des résumés de match.
Aujourd’hui le basket professionnel français n’est plus que poussière
Impossible de ne pas évoquer aussi ces grandes et belles photos qui rythment la centaine de pages qui composent ce numéro #1. Peut-être est-ce même la seule bonne raison qui a poussé l’équipe à produire un magazine dans ce format improbable et intransportable (ça ne rentre pas dans le sac à dos, vous voilà prévenus).
Ici, des portraits serrés, colorés, très pop, d’adolescents en sueur qu’on devine pris à la fin d’un entraînement, là des screenshots de jeux d’arcade vintage (qui restent à identifier), ailleurs les images d’une compétition entre jeunes joueurs au Sénégal ou sur un playground à Manille…
L’ambition d’Entorse est aussi forte que leur constat sur le basket français est terrible : « Plus une seule équipe française n’a été en mesure de concurrencer les grands d’Europe. La faute à qui ? » écrit Stéphane Peaucelle-Laurens dans son édito, « aujourd’hui le basket professionnel français n’est plus que poussière. Pas de structure, pas d’infrastructure, pas de visibilité ».
Cette poussière Entorse défendra quitte à s’en « briser les chevilles ». Un strap et il rejoindra le parquet.
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Entorse #1 est disponible à la vente en ligne et dans quelques lieux de vente à Paris, Montpellier, Chatou et Charleville.
Visuel : © Benjamin Schmuck pour Entorse