Le vintage c’est pas qu’une question de fringues mais aussi d’état d’esprit. Une collection blu-ray consacrée au cinéma français né sous Giscard ravive une pertinence sociologique.
Il est toujours bon de rappeler que le cinéma français n’est finalement qu’une question de tendances. Depuis toujours, cette production s’est imprégnée de l’air du temps, créant des périodes ou des règnes temporaires pour certains registres. Pour autant, il est nécéssaire d’avoir un certain recul pour pouvoir l’analyser, la définir pleinement, dans son aspect structurel ou sociologique. A ce titre, il manquait un regard en coupe sur le cinéma français des années 70. Peut être parce que c’est un moment bien plus singulier qu’il n’y paraît, coincé entre une stabilisation des entrées après deux décennies en baisse constante et la fronde organisée par les réalisateurs de la Nouvelle Vague contre un cinéma grand public pépère engoncé dans ses formules. Mais plus encore par ce besoin de remettre les pendules à l’heure de Mai 68 et ses envies de libertés de ton comme d’expression. Cinquante ans plus tard, une collection de Blu-Ray, Nos années 70 s’attelle à cet état des lieux.
Une manière de faire l’histoire à l’envers ?
Ou plutôt de remettre les choses dans le bon sens. La première salve de cette collection assemble autant des grands succès populaires d’alors comme Je sais rien mais je dirais tout de sérieux bides comme Calmos ou des films plus marginaux comme Défense de savoir,pour rappeler à quel point le cinéma français mainstream de cette décennie avait décidé de s’aventurer sur de libertaires chemins de traverse tout en reflétant les mutations sociales de l’époque. Ainsi derrière des gags purement burlesques, Pierre Richard pointait du doigt les empire familiaux capitalistes tandis que Bertrand Blier prenait au pied de la terre la guerre des sexes pour en faire un check-up gouailleur de la masculinité, d’une franchise inimaginable aujourd’hui. Plus étonnant encore, le soin apporté aux bonus de ces Blu-ray exhumant des archives télé, très loin de la vacuité actuelle virant à des éléments de langage promotionnels. Le tout racontant autant la France d’alors, dans ses questionnements et ses contradictions, pour un étonnant coup d’oeil dans le rétro, que ce soit en mettant en avant le fonds socio-politique de films cultes et en réhabilitant des perles méconnues (on recommande chaudement dans la seconde salve à venir La vieille fille et L’ordinateur des pompes funèbres) mais surtout quand,
sans jamais vouloir s’enfermer dans une posture réac façon «c’était mieux avant », cette collection pousse le cinéma mainstream d’aujourd’hui à s’interroger sur ce qu’il a perdu, en méprisant les conversations de comptoir, auxquelles participait pleinement cette production des années 70 en parlant directement aux gens, pour devenir un café du commerce de l’entre-soi.
Nos années 70. Première salve disponible depuis septembre. 2ème à paraître début décembre. StudioCanal.