Des albums, il en sort désormais 2520 par semaine (chiffre approximatif). Pour vous aider à faire le tri, voici la sélection hebdo de Radio Nova des albums à ne pas louper.
Johan Papaconstantino, Premier Degré (Animal63 / Believe)
slowthai, UGLY (Method Records)
Vraiment différent aussi, le flow, la fureur et le feu qui émanent de slowthai, le rappeur de Northampton qui flirte depuis toujours avec le punk hardcore et qui livre, avec ce troisième album, un disque toujours aussi provocateur, dévergondé, vénère et plein de cette gouaille ravageuse qui a fait sa popularité de l’autre côté de la Manche. Sur UGLY (ça veut dire « LAID », pour ceux qui ne sont pas habitués à ces mots-là), le Britannique se fixe une nouvelle ambition : s’aimer lui-même afin de mieux tolérer (et apprécier ???) la présence des autres. Un meilleur manuel de développement personnel que les bouquins de Fabrice Midal.
David Walters, Soul Tropical (Heavenly Sweetness)
Le cœur tourné vers les Antilles, d’où est originaire sa famille et qu’il regarde depuis toujours, et le corps solidement ancré aux côtés de consœurs et confrères qui partagent une même vision métissée, généreuse, dansante de la musique (Guts, Flavia Coelho, Captain Planet, Anthony Joseph, Ballaké Sissoko, Vincent Segal, K.O.G…), David Walters offre un nouvel album parfait pour les beaux jours qui, nous le sentons, seront bientôt de retour. Des couchers de soleil et lever du matin sur lesquels nous danserons, puisqu’il est calibré pour cela, sur ce disque à l’âme tropicale et la créativité collaborative toujours aussi intacte.
Sabrina Bellaouel, Al Hadr (InFiné Music)
“La spiritualité est une partie intime de mon langage” explique Sabrina Bellaouel, autrice d’un disque passionnant et d’une richesse folle, qui paraît chez InFiné. Un album qui, par son titre et par sa vocation à ouvrir au maximum les fenêtres pour aérer les cerveaux un peu trop renfermés, renvoie à l’idée du “temps présent”. Ce temps où la house, le dubstep, le punk, le R&B, la néo-soul, la musique concrète ou la techno peuvent cohabiter au sein de la même œuvre sans avoir peur de se marcher sur les sandales. L’album d’une femme de sa génération, celle qui n’hésite plus à dire qui elle est vraiment au plus profond d’elle-même.
Albin de la Simone, Les cent prochaines années (Tôt ou Tard)
“Qu’est-ce que tu fais les cent prochaines années ?” Si la vie le lui permet (il battrait alors certains records de longévité, mais c’est un détail), Albin de la Simone continuera sans doute à composer des albums aux allures de longues confessions, le genre que l’on n’attendait ni à ce moment, ni à cet endroit-là. Sur son septième album (le dernier en date, Happy end, était exclusivement instrumental), Albin jongle avec les mots et les émotions comme dans le grand cirque d’une existence qu’il décrypte, raconte et revisite sur onze morceaux sensibles, drôles et sincères, à l’image d’un artiste rassurant et sur qui on sait que l’on pourra toujours compter, lors des coups de moûts, pour se rappeler que la vie est aussi triste qu’elle est belle. Vivement les cent prochaines années, qu’on les passe ensemble.
Adi Oasis, Lotus Glow (Unity Records)
Vue dans Chambre noire cette semaine, Adi Oasis fait groover les lotus (ça ne veut rien dire ? Tant pis) et convoque la douceur de cette soul bercée de R&B, de hip-hop, de musiques électroniques et de combats qui vont vers la meilleure acceptation de l’autre, de soi-même, du monde des alentours (pareil que slowthai, mais en un tout petit peu plus apaisé). “La lueur, c’est l’endroit où je poursuis ma route”, dit-elle. C’est une magnifique formule qui ouvre des perspectives. Et donne envie de s’y arrêter un instant, sur cette route. Qu’on contemple les étoiles et que l’on danse, après tout.
Kali Uchis, Red Moon in Venus (Geffen Records)
Des étoiles… et une lune rouge à contempler, cette fois, en écoutant cette semaine le disque de Kali Uchis, qui pense, elle aussi et depuis les États-Unis d’Amérique, une néo-soul digne des temps modernes où les tendances s’entremêlent et les humeurs aussi. Dans nos oreilles et direct, dans le cœur : la petite merveille « All Mine » et « Moonlight », ou comment assumer enfin l’ode à la Lune que vous entonnez à chaque tombée du jour depuis plusieurs décennies en surprenant à chaque fois votre entourage. Vous n’êtes pas seuls.
Rogê, Curyman (Diamond West Records)
Figure emblématique, et durant très longtemps, des nuits de Lapa (l’un des quartiers bohèmes et branchés de Rio de Janeiro, d’où il est originaire), Roger José Cury, dit « Rogê », a déménagé sur la côte ouest américaine ces dernières années (les violences liées à la présidence Bolsonaro, encore), d’où il a pu proposer un disque en collaboration avec son confrère Seu Jorge. Il a également rencontré là-bas Thomas Brenneck, du célèbre groupe afro-funk Budos Band (leur album éponyme de 2005 est à réécouter), qui l’accompagne sur un disque, Curyman, marqué par l’empreinte du sambalanço, mélange de samba et de funk porté par un tube, “Pra Vida”, qui marque instantanément quiconque y est confronté. À votre tour.
I:Cube, Eye cube (Versatile Records)
Enfin, le sixième album en date d’I:Cube, producteur discret, fidèle de l’écurie Versatile (celui de Gilb’R, ex Radio Nova), qui hésite ici entre musique électronique de club où la lumière n’est plus (“Vantableu”, “La grotte aux fées”) et celle de laboratoire à néons blancs (“Prismatic”, “Gypsotheque 2”, “Montsouris”). Un peu des deux donc pour ce disque où figure aussi le très doux et atmosphérique “Kaszio plus 1”, joyau de plus de 3 minutes qui auraient pu en durer 30 tellement elle permet d’accéder ailleurs. Repeat, de fait. On y retourne. On s’y retrouve ?