En Italie, on écoute peu de rap. Celui des Italiens est pourtant primordial.
Chaque semaine, dans BAM BAM (le Bureau des Affaires Musicales), on prend le train, l’avion, on va se balader ailleurs pour écouter ce qui, justement, s’écoute dans d’autres contrées. Et aujourd’hui, c’est en italien que l’on se demande : à qui profite le stream ?
En Italie, que l’on parle de contexte politique, économique, social ou culturel, c’est actuellement la crise à toutes les échelles. Et on se demande comment, dans ce tourbillon, la musique peut-elle tirer son épingle de ce triste jeu.
En Italie, premier constat lorsque l’on regarde les charts, les tops streaming ou les classements des meilleures ventes, on écoute de la pop américaine ultra commerciale. Comme à peu près partout en Europe, ce qui s’écoute à fond la caisse dans les Pouilles ou à Naples, c’est Calvin Harris, Diplo, DJ Snake ou Lady Gaga.
Mais ce qui marche surtout très très bien en Italie, c’est la musique italienne.
Le groupe Måneskin, notamment. Ils ont presque gagné un télé-crochet – ils viennent de Rome, et font du pop rock. Leur dernier album, sorti chez Sony, cartonne, puisque onze de leurs morceaux figurent dans le top 100. Leurs chansons parlent d’amour, immortel et à distance. Ce qui fonctionne en Italie, et ce n’est pas nouveau, c’est avant tout le romantisme.
L’Italie et la musique urbaine : une relation compliquée
Par ailleurs, ce qui est assez original, par rapport aux autres top 50 en Europe, c’est que la musique urbaine est, en Italie, assez peu représentée. Il n’y a pas tant de rap, de trap, de R&B que ça, en tout cas par rapport à la France où l’industrie musicale est convertie à l’urbain. Le rap italien, majoritairement conscient, détient pourtant une parole assez nécessaire à cette époque trouble de l’histoire. Il y a notamment un artiste qui se fait remarquer, Tommy Kuti. Il a grandi en Lombardie, il est d’origine nigériane et son hit s’appelle « #AFROITALIANO ».
‘Afro-Italien’, pour toi, c’est un casse-tête
« Afroitalien », tout est dit, et les paroles de Tommy Kuti sont frontales et indispensables. « Tu dis que je suis un nègre, un immigré / Ta pensée est un peu limitée / Le monde a changé, ce n’est pas compliqué / Mais ‘Afro-Italien’, pour toi, c’est un casse-tête. »
Le rappeur s’adresse directement à ses compatriotes, dans une société où le racisme envers ses propres enfants, qu’ils soient les meilleurs footballeurs ou de superbes musiciens, est omniprésent, et est exacerbé par les politiques qui se pensent ainsi plus proches du peuple. La parole de Tommy Kuti, ainsi, fait du bien, et notamment à ces « nouveaux italiens » comme les appelle le chanteur – des jeunes issus de l’immigration, qui se sentent appartenir au pays sans pour autant être reconnu par ses institutions.
Sono un Italiano Vero
L’album de Tommy Kuti s’appelle Italiano Vero, un titre qui réfère à un classique de la chanson italienne, le tube de Toto Cutugno : « Lasciatemi Cantare » (« Sono un Italiano Vero »), sans pour doute un moyen pour le rappeur de rappeler à ceux qui en doutent qu’il a les références qu’il faut.
BAM BAM, c’est le Bureau des Affaires Musicales de Radio Nova, animé par Sophie Marchand et Jean Morel, du lundi au vendredi sur Nova.
Visuel : (c) Facebook de Tommy Kuti