Clit Révolution est une série documentaire produite par FranceTV Slash. Elle parle de désir, de fantasmes, d’orgasmes, et de réappropriation du corps féminin. On est allé en rencontrer les auteures.
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Clit Révolution, c’est une série documentaire diffusée à partir du 7 mars sur FranceTV Slash, la chaîne 100% web de France Télévisions. Une série très incarnée, qui parle de désirs, de fantasmes et d’orgasmes. Ça valait bien une petite visite à Elvire Duvelle-Charles et Sarah Constantin, activistes féministes, et co-auteures de la série.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire cette révolution du clito ?
Elvire Duvelle-Charles et Sarah Constantin : En fait on s’est rendu compte que, même en étant féministe depuis des années, on avait toujours des tas de complexes liés à notre corps : on se regardait la chatte on trouvait qu’elle était moche, on avait cette injonction à s’épiler, bref on était pas du tout sorties des diktats sexistes et patriarcaux. On s’est dit que c’était ça qu’il fallait révolutionner en premier dans la lutte féministe : la lutte pour la réappropriation du corps, du plaisir et des orgasmes.
C’est donc le même sujet d’aimer son corps et de prendre du plaisir ?
Elvire Duvelle-Charles et Sarah Constantin : Ça va ensemble, car on s’est rendu compte que la plupart des femmes avaient une méconnaissance totale de leur corps, de leur sexe, de leur clitoris, et de leur vulve. Des mots qu’on ne dit jamais. Et si on peut les dire à la radio c’est super.
En fait c’est lié parce que la méconnaissance du corps induit la méconnaissance du plaisir. Si on ne sait pas comment fonctionne un clitoris, on a peu de chances d’atteindre un orgasme ou d’explorer toutes les façons d’atteindre cet orgasme. Explorer son corps, c’est explorer son plaisir, et on a quand même attendu 1998 avant de savoir à quoi ressemblait un clitoris dans son ensemble. On a eu notre premier clitoris représenté pleinement dans un manuel de SVT en 2017. On a beaucoup de retard là dessus. Ça reste un obstacle et un problème, y compris dans des milieux déconstruits.
L’organe a été décrit pour la première fois en 1998 ?
Elvire Duvelle-Charles et Sarah Constantin : Oui, par une urologue australienne qui s’appelle Helen O’Connell. C’est quand même 29 ans après qu’on ait marché sur la Lune pour la première fois.
On a décrit le clitoris pour la première fois 29 ans après avoir marché sur la lune.
Elvire et Sarah vous êtes activistes, Femen ou ex-Femen. Vous êtes donc a priori à l’aise avec votre corps. Vous n’êtes pas à l’abri des complexes pour autant…
Elvire Duvelle-Charles et Sarah Constantin : Il n’y a rien à voir entre le fait d’utiliser son corps comme un outil politique, comme une armure, et le fait de se retrouver dans son intimité, seule ou avec quelqu’un. Ce sont deux choses complètement différentes. La plupart des filles Femen ne se baladent pas la plupart du temps torse nu ou ne font pas de topless à la plage.
Dans notre intimité on est seul, avec son ou sa partenaire, alors que dans un combat politique on est plusieurs. Du coup on tend à penser très souvent dans notre sexualité que l’on est « anormal ». On le voit sur notre compte Instagram, par le biais duquel on échange beaucoup avec la communauté. On partage des témoignages, on pose des questions, et on se rend compte que l’une des questions qui vient le plus souvent c’est « est-ce que je suis normal.e ? » : « Je n’arrive pas à jouir par la pénétration, suis-je normal.e ? » « Je n’arrive pas à jouir tout court, suis-je normal.e ? » « Je n’ai pas envie de me masturber, suis-je normal.e ? » Tant qu’on ne partage pas et qu’on ne libère pas cette parole-là, on ne peut pas se rendre compte que c’est quelque chose qui est global. C’est plus simple d’avoir du courage quand on est plusieurs que quand on est seul. Et dans sa sexualité ou son intimité, on se sent très seul.
La série est un genre de road-trip à la rencontre de femmes qui se réapproprient leur corps et leur sexualité en France, en Angleterre, au Kenya, au Japon et dès le deuxième épisode on y parle de porno. C’était important de commencer par là ?
Elvire Duvelle-Charles et Sarah Constantin : Oui c’était important car on est une génération qui s’est éduquée au sexe en grande partie par le porno, justement par manque d’éducation sexuelle. On avait envie de voir si c’est le fait de filmer un acte sexuel qui pose un problème ou si on peut révolutionner le porno. Le porno peut-il être une solution pour repenser nos désirs, nos fantasmes d’une manière non-sexiste et non-hétéronormée ? On était obligées de faire un porno.
Visuel © capture d’écran / Instagram @ClitRévolution