La réalisatrice franco-sénégalaise récompensée pour son film « Atlantique ».
La réalisatrice franco-sénégalaise Mati Diop a remporté ce dimanche 26 mai le Grand Prix du Jury du festival de Cannes pour son film Atlantique. Dans Néo Géo, Liz Gomis fait le portrait de la cinéaste.
Comme un point de départ dans sa carrière cinématographique, alors que paradoxalement elle a déjà réalisé un court métrage et joué dans deux films, Mati Diop s’est laissée porter par l’esprit de son oncle, Djibril Diop Mambéty, le réalisateur de Touki Bouki décédé en 98 et qu’elle n’a pratiquement pas connu. Un héritage familial et artistique qui pèse lourd. Touki Bouki a été restauré par la fondation de Martin Scorsese, le réalisateur américain considérant le film comme un chef-d’oeuvre sous-estimé. Pile-poil quarante ans plus tard, Mati Diop réalise Mille soleils, à la croisée du documentaire et de la fiction, qui reprend là où le film de Mambety s’est arrêté.
« Les dimensions familiales et cinématographiques sont entremêlées ».
Celle qui avait séduit le cinéma français en 2008 sous la direction de Claire Denis dans 35 Rhums est passée derrière la caméra sans formation classique, tout juste un labo de création au Palais de Tokyo et une formation au Fresnoy, Studio National des Arts Contemporains. L’art, c’est presque inné chez Mati. Elle qui a grandi dans un univers où la création a toute sa place. Un père sénégalais, Wasis Diop, musicien reconnu, et une mère française, photographe, soit le combo parfait pour s’intéresser au cinéma. De créations sonores pour le théâtre et pour l’adaptation des Nègres de Genet par Cristèle Alves Meira à la création vidéo pour Mikhail Bulgavov à la Cartoucherie ou la réalisation de courts-métrages entre amis, Mati Diop pousse l’exploration entre son et image toujours plus loin.
En 2008, elle entreprend son premier voyage à Dakar, comme pour renouer avec sa part d’héritage sénégalais et avec le spectre de cet oncle qui la fascine mais dont elle doit pouvoir s’affranchir pour devenir une réalisatrice à part entière, et non la nièce de…
Avec son cousin, elle retrace le parcours du film Touki Bouki, rencontre Magaye Niang, l’acteur principal et comprend que les rêves de la jeunesse sénégalaise d’hier sont devenus la hantise de ceux d’aujourd’hui. Fuir pour échapper à une réalité, fuir pour éclaircir l’horizon… Fuir. On est en 2008 et elle tient déjà ce qui sera Atlantique un court-devenu-long métrage, qui a remporté dimanche 26 mai le Grand Prix du Jury au Festival de Cannes.
La reconnaissance d’années d’écriture, de recherche et de travail pour Mati Diop et l’espoir pour les futurs réalisateurs du Sénégal et de la diaspora “prêts à entrer dans le cinéma universel” pour reprendre les termes de Magaye Niang. Djibril Mambety Diop passe brillamment le témoin à Mati. Elle est désormais seule en scène, riche de cet héritage mais résolument réalisatrice de son temps.
Le Néo Géo du dimanche 5 mai, c’est en podcast.
© Dominique Charriau/WireImage via Getty Images