Bien plus qu’une curiosité pop japonaise ressuscitée, House reste un film surnaturel. Dans tous les sens du terme.
De tous les films légendaires, peu survivent à leur réputation, sont à la hauteur de leur propre mythologie. Et puis il y a ceux qui la surpassent, s’avèrent encore plus fous que leurs rumeurs. C’est le cas de House, film resté aussi fou qu’inclassable quarante-six ans après sa sortie originelle dans son Japon d’origine. En France, hormis quelques projections en festival à l’époque, House n’avait pas connu d’exploitation en salles avant d’arriver enfin aujourd’hui sur les écrans. Quelque part, c’est tant mieux, qu’en plus qu’une découverte tardive, c’est la modernité d’un film explosant tous les codes qui s’imposent aujourd’hui. Au-delà de sa part de trip formel dingo, House reste porté par une liberté d’esprit et de ton impensable pour de la production grand public.il reste d’ailleurs assez stupéfiant de savoir que ce film a été envisagé par la Toho comme une réponse japonaise au triomphe des Dents de la mer, tant il s’en éloigne par son récit embrassant toutes les pistes, du teen movie à la co-médie musicale, du film d’horreur au mélo, autour d’un groupe d’adolescente en villégiature chez la tante paralytique de l’une d’elles.
Au plus simple, on pourra définir le film de Nobuhiko Ôbayashi comme une réappropriation de l’esprit des colllages du cinéma surréaliste primitif combiné aux bricolages d’un art vidéo alors naissant, d’une collusion entre cinéma de studio à l’ancienne, via un scénario pétri de grands sentiments ou des décors peints dignes des grandes heures du cinéma de studio, et l’expérimental psychédélique. On peut donc avoir affaire ici à du mobilier hanté et carnivore ou à un côté Club des cinq kawaï qui serait immergé dans un délire gothico-psychanalytique à la Argento. Derrière cette délirante façade grand-guignol, éclatante de couleurs – qu’une impeccable restauration restitue à la perfection- le plus troublant reste pourtant la part d’esprit adolescent qui s’empare de House, dans sa part de farce hirsute, mais aussi dans le spleen qui le gagne à la longue, à l’image d’un plan où le visage d’une des gamines passe du sourire aux larmes en un clin d’œil. La chose est furtive dans ce torrent d’idées graphiques ou d’écriture avant-gardiste, mais imprègne durablement cette chronique cinglée de la féminité, unissant la mélancolie des jeunes filles en fleur à celle des sorcières en deuil, pour l’exorciser dans une phénoménale sarabande. Que ce soit pour écarquiller les yeux devant une créativité démentielle ou laisser des larmes en couler devant un film plus poignant qu’il n’y paraît, il faut donc aller voir House, expérience de cinéma exhumée du passé, mais bien plus vibrante que celles proposées par le présent.
En salles le 28 juin.
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