Petit tour d’horizon de ces chansons de campagne électorale
Raconter une histoire sans musique c’est triste. Un story telling politique sans chansons, impensable. Dernièrement, le Parti Socialiste nous en a fait une belle démonstration… Retour sur la relation musique/politique. Une vraie histoire d’amour…
L’utilisation des plus grandes partitions par les politiques ne date pas d’hier. Beethoven par exemple, dédie en 1824 sa mythique Symphonie n°9 – la Neuvième -, au roi Frédéric-Guillaume III de Prusse. Tout ce que le XXème siècle a fait de dictateurs a aussi vu passer symphonies autoritaires et marches révolutionnaires.
L’animal politique a souvent besoin de la musique parfaite pour illustrer ses ambitions. Au risque parfois de se frotter aux droits d’auteur. L’UMP a dû faire profil bas après l’emploi outrancier de l’hymne universel Kids du groupe new-yorkais MGMT. Condamné à verser 30 000 € de dommages et intérêts au groupe pour avoir voulu lifter la famille politique d’Enrico Macias, Mireille Mathieu et autre Faudel.
En 2000, George Bush exploite lui le titre I Won’t Back Down (Je ne reculerai pas), de Tom Petty, s’attirant les foudres du chanteur. La vengeance de Petty ? chanter chez Al Gore, l’adversaire de Bush, le soir des élections et de la défaite démocrate. Être associé à un politicien de droite, peu populaire dans le monde culturel, peut s’avérer risqué pour l’image d’un chanteur. Mieux vaut faire savoir qu’on s’oppose à l’usage abusif de sa musique.
Hilllary Clinton a bien veillé à demander à Céline Dion avant de poser You and I comme bande originale de ses primaires en 2008. John McCain, on ne sait pas pourquoi, a lui fait de Take a Chance On Me de Abba son hymne de campagne.
Le meilleur reste encore d’avoir son propre titre, une chanson composée spécialement pour le candidat. Les américains rivalisent de classe. Franck Sinatra écrit et interprète High Hopes pour son ami Kennedy en 1960. Will.i.am rentre lui au panthéon avec son Yes We Can délicatement posé sur les slogans d’Obama.
En France, c’est une autre paire de manche. En 1977, le Parti Socialiste veut Changer la Vie, mais en 1981, Mitterrand reviendra à quelque chose de plus solennel avec Mitterrand Président. Strauss-Khan tombe beaucoup, beaucoup plus bas pour les primaires en 2006, en officialisant une reprise mélodique de Cauet pour Strauss-Khan y va gagner. Pour la petite histoire, une caméra qui suivait DSK à la Fnac avait volé une consigne populiste de son chargé de com’ « ...vous allez demander au vendeur ‘Zidane y va marquer’ pour votre petite fille ». Sa chanson est donc un hymne à l’auto-dérision. Le tube dance de Ségolène pour 2007 est lui malheureusement très sérieux.
Pour que la Seine ne charrie plus, de poissons morts / Qu’on s’y promène, et puisse y rêver encore. Ça, ce sont les paroles de Chirac pour Paris, en 1977. Bien avant sa candidature RPR en 1988, et son hit Jacques Chirac Maintenant, écrit par un compositeur de musique de film, proche de Gilbert Montagné et Sardou. On dirait un générique mal traduit d’un dessin animé japonais. Un four si l’on en croît son score au deuxième tour (45%).
Avant le Modem, il y avait l’UDF. Et avant Bayrou, il y avait un autre nounours, Alain Madelin. En 1995, il est porté par Un pays aux couleurs de la vie, piano voix minimaliste, jusqu’au premier tour. Le Parti Communiste tente lui un retour de hype dans les 80’s avecForgeons notre parti.
Le Front National n’est pas en reste. Avant de retrouver les bases de la droite en harmonies wagnériennes, Le Pen est passé par la case zouk en 1995. Si si c’est vrai. Isabella, chanteuse d’origine malgache, nous gratifie en 1997 d’un Avec Jean-Marie, je n’ai plus de peine. Les paroles valent de l’or « Les politiciens / c’est la loi des coquins […] Et pendant ce temps là, le pays se dégrade / C’est l’insécurité, c’est l’immigration « . Le tout sur des nappes de percus africaines et des mélodies antillaises.
Sarkozy, avant le lipdub, a lui aussi a copié ceux qu’il attaque dansMon Pays France, un rap pour sa campagne de 2007. Aïe.
Ces chansons, toutes d’un goût désuet et toutes l’objet des pires moqueries sont le plus souvent des tentatives ratées de séduire un nouveau pan d’électorat. En témoigne aussi la tentative kraftwerkiennepleine de réverb de Sarah Palin, magique. En Irak, les élections se joueraient carrément en musique.
Les campagnes politiques modernes se jouant sur la toile, la musique de soutien à une candidature est aujourd’hui plus l’apanage de supporter geek. Espérons qu’elle le reste.