Imaginons un petit personnage pour incarner la folk. Une effigie de dessin animé, à la manière des tifins ou des mascottes animalières sur les paquets de céréales hyper-sucrées. Allez, maintenant qu’on est lancés dans le projet, donnons un nom à cette création ludo-marketing : appelons-la Folky, tiens.
Au gré de ses pérégrinations, il baladerait sa bonhomie souriante à travers le globe, guitare en bandoulière, croisant une foule de collègues sympathiques (Frankie Cosmos, Y La Bamba, Nick Hakim, Cola Boyy, Mac DeMarco, etc.), autant de porte-drapeaux d’un oekoumène musical à découvrir d’épisodes en épisodes, renseignant et étendant la carte de ce monde ouvert, sans frontières, celui de la sono mondiale – si intimement tissée à nos fibres et à nos antennes.
Ce Folky-là pourrait ressembler à Juan Wauters. Pas John Waters, Roger Waters ou Antoine Wauters, attention ; Juan Wauters.
Que vous dire de plus sur Juan Wauters, qu’on ait pas déjà évoqué lors de ses précédentes venues en terres bordelaises – relatées ici en 2022, ou là en 2019 ? Eh bien l’on pourrait, par exemple, parler de l’album qu’il interprètera dans la cale du ferry bacalanais Wandering Rebel, sorti au mois de juin chez Captured Tracks. Un disque auquel, par ailleurs, il adjoindra bientôt un addenda baptisé Limbo, avec une poignée d’inédits et de versions alternatives – tantôt en anglais, tantôt en espagnol.
Si l’on ne donnera pas dans l’antienne souvent moquée (à raison, le plus souvent) consistant à coiffer cet album du label « disque de la maturité », Wandering Rebel est à tout le moins celui où Juan Wauters goûte aux joies d’une certaine stabilité. Contrainte, d’abord, comme pour beaucoup (à cause du confinement), puis embrassée sans barguigner. « Si la possibilité de tourner, de faire des concerts, n’était jamais revenue, j’aurais été en paix malgré tout. »
Fort heureusement, il n’a pas stoppé là, sec et net, ses ba(la)dinages itinérants ; il a simplement calmé le jeu et posé un bémol sur sa bougeotte, renouant avec le Montevideo de son enfance, en laissant New-York dans le rétroviseur. « Avant, New York, c’était l’endroit où je revenais toujours, mais je n’ai jamais vraiment eu de maison, de « chez moi ». Maintenant, à Montevideo, j’ai un endroit où rentrer et des gens qui m’attendent. » La maison et le monde : une dialectique que Wauters continue d’explorer – toujours nuancé, amène et sympathique, en endossant moins la livrée du lutin insaisissable.
Avec le soutien d’un cahier et d’un iPad rechargé à l’énergie solaire, l’antifolkeux sud-américain a posé au bord de l’océan (celui qu’on aperçoit sur la pochette ?) les premières bases de ce sixième album studio, où sont gravées une poignée de chansons faisant la part de la mélancolie introspective, et celle de la fantaisie décomplexée. Non, il n’y a pas là que des arpèges de guitare en bois d’arbre. Les influences latinos affleurent ça et là, hip-hop aussi parfois et une folie douce, joueuse, qui s’en donne à coeur joie, comme sur l’ébahissant « Bolero », où Juan Wauters recycle un interlude d’Introducting Juan Pablo, et adjoint à la mélodie de Ravel rejouée au vibraphone un flow hip-hop et – oui – des cornes de brume.
Cerise sur le gâteau, tout ceci sera annoncé, devancé, par les chansons du trio indie-pop bordelais Quiche My Ass. Et, en guise de seconde griotte au pinacle pâtissier, ajoutons que Nova Bordeaux vous offre des tickets, sans qu’il vous soit nécessaire de dégainer votre larfeuille ou votre CB, avec le mot de passe Nova Aime. La bonne adresse pour dégoter cette aubaine ? C’est juste ci-dessous.
Juan Wauters + Quiche My Ass, le mercredi 7 novembre à 20h30 @ IBoat (Bordeaux).