Malgré des problèmes de logistique, l’amour de la fête a encore triomphé pour cette sixième édition de Château Perché
Il existe des lieux hors du temps, où l’imprévisible règne et seul l’instant compte. Château Perché en est un bon aperçu, avec ses 250 artistes proposant des performances musicales ou théâtrales, des arts visuels ou encore des ateliers créatifs. Pour sa sixième édition, le festival a encore changé de lieu. Après le château d’Avrilly, l’équipe de Perchépolis a investi l’arboretum de Balaine, à Villeneuve-sur-Allier. On y trouve un château accolé à un étang et entouré d’un immense parc botanique accueillant onze scènes, gérées par des collectifs de l’installation à la programmation, ainsi que de multiples décors prévus pour l’occasion.
Le jeudi soir, après que la navette partie de Paris à 17h, sous 42°C, nous ait déposé à quatre kilomètres de l’entrée du festival à cause d’une file de bouchon interminable, l’arrivée sur le camping s’est faite à minuit sous un ciel resté au stade de la menace. Festivaliers et artistes ayant connu les mêmes conditions, la programmation de la première nuit a été décalée de plusieurs heures. David Walters a donc entamé son live sur la scène du Bel-Etang, montée sur pilotis par le collectif Sidi&Co, au lever du soleil au lieu de deux heures. Face à la fatigue, aux festivaliers aussi doux que perchés et au lieu d’une beauté à la hauteur de ses arbres, la rencontre avec l’artiste fut propulsée dans une autre dimension. Avant David Walters, le DJ Akzidance a aussi suivi le thème du Bel-Étang, dédié à l’Afrique, en mettant le label ougandais Nyege Nyege et la Gqom d’Afrique-du-Sud à l’honneur.
Si l’une des deux scènes principales, La Plaine, a vu défiler des DJ Sets d’exception le vendredi soir, naviguant entre l’uk garage, la house et la techno minimale avec les Lyonnais Lumbago et Flore ou bien les Anglais Alec Falconer et Dr Banana, la majorité du public déambulait aléatoirement au sein de la boucle que formaient les onze scènes disséminées autour du château et de l’étang. Sur le chemin, on pouvait croiser une araignée en bois de deux mètres de haut qui transperce la nuit avec ses yeux rouges avant de s’installer dans un tipi pour discuter. Véritable lieu d’exploration et d’évasion, Château perché se redécouvre sans cesse au fil des balades. Tant par son visage qui se modifie, en fonction du jour ou de la nuit, que par la diversité des installations. Le jour, on ne pouvait qu’être ébahi face à la beauté du lieu. Tandis que la nuit, les jeux de lumières projetés sur le château, ou qui se reflétaient dans l’étang, nous hypnotisaient. Ainsi, dans l’obscurité, la scène du Dôme Blanc nous propulsait dans une dimension stellaire avec sa sphère remplie de décors luminescents. Tandis qu’au lever du jour, Romain Play et Benedetta de Camion Bazar permettaient aux plus vaillants de poursuivre leur voyage mystique à coup de mélodies enivrantes dont ils ont le secret.
Longtemps, on a cru pouvoir éviter les orages et la grêle. La pluie s’est finalement abattue samedi, pendant une partie de la nuit, contraignant les organisateurs à fermer cinq scènes. Mais au final, c’est l’amour de la fête qui a triomphé : les plus téméraires ont continué à danser sous la pluie, quand d’autres sont partis s’abriter et se reposer au camping, pour revenir en même temps que le soleil. En ayant mis en place des thèmes par tranche de 24h, les organisateurs ont créé une véritable osmose entre leurs ornements envoûtants et les festivaliers. Ces dernier participaient au décor avec leurs ailes de papillons étincelantes, leurs toges colorées ou bien leurs totems surplombés par une méduse bleue phosphorescente.
La dernière nuit était pourvue d’une programmation toujours aussi surprenante et relatant la diversité des musiques électroniques. Ainsi, au Cyprès Chauve, la scène dédiée à l’Amérique du Sud et montée par le collectif Caravana, les Argentins de Pasaje Universo ont assuré une prestation captivante, teintée d’improvisation, en mélangeant instruments traditionnels et sonorités synthétiques. Dans le même registre, l’Argentine Kaleema a fait voyager le public en mélangeant esthétique organique et digitale.
Pour conclure le festival, la fanfare Technobrass, venue de Rio, a embrasé le public une ultime fois avec une énergie très communicative. Si la musique est au coeur du festival, l’atmosphère de Château Perché est unique. Malgré les problèmes de logistique, leur point d’honneur à créer une communion entre les festivaliers, notamment à travers l’éveil des sens et la communication, gomme la plupart des défauts. Séances de yoga, méditations, ateliers de body-painting ou bien créations de totems permettaient de se ressourcer ou de s’inclure un peu plus dans l’univers du festival. Vous pensiez connaître la définition de “Perché” ? Ici, chacun a la sienne.
Photos : Rémi Benchebra / Marie