Le concert du lundi soir
Jennifer Yaa Akoto Kieck a tout juste 23 ans. Née à Hambourg d’un père ghanéen musicien de high-life et d’une mère allemande, elle a sillonné l’Afrique avec son père pendant toute son enfance. De retour en Allemagne à l’adolescence, c’est à son tour de se mettre à la musique. Elle finit par rencontrer le trio de producteurs allemands Kahedi, signe chez Warner Music et sort son premier album, Baby Blues, en juin 2012.
« Nouvelle étoile au firmament de la soul » selon Arte, « princesse soul » pour France Info, « soul seeker » plutôt que « soul singer » selon ses propres mots, Y’akoto est l’objet de toutes les éloges. Il fallait donc voir ça en live, et c’était hier soir à la Maroquinerie.
C’est d’une démarche féline, toute en grâce et en sourires que Y’akoto s’est présentée sur scène entourée de ses quatre musiciens, devant un public venu nombreux. Elle entame quelques notes et c’est d’abord sa voix qui frappe : un grain grave, bluesy, qu’elle pose dans la douceur plutôt que dans la performance vocale – un bon point pour elle, qui pourrait se contenter de nous impressionner. On pense à Erykah Badu ou Amy Winehouse, pour ne citer que des voix récentes.
Elle chante calmement les deux premiers titres, Tamba et Baby Blues, plantée toute droite derrière son micro, ne bougeant que ses mains, avant de se mettre en mouvement sur Moving et Diamonds. Avant chaque chanson, Y’akoto prend le temps d’exposer au public l’objet de la chanson, son histoire, son inspiration – et souvent en français, puisque la belle maîtrise plutôt bien la langue de Molière.
« Cette chanson est pour tous les hommes qui parlent pas » explique-t-elle avant Talk To Me. Y’akoto est mignonne, elle le sait, elle en joue : elle minaude, fait de grands sourires, passe constamment ses doigts dans son afro. Une vraie entreprise de drague du public, mais attention, d’un naturel désarmant.
Elle attaque ensuite les chansons Body Movements et Without You, pour lesquelles elle quitte le micro et se met à danser. Ses mouvements imprévisibles sont d’une élégance folle : Y’akoto a également une formation de danseuse, elle aime ça, et ça se sent.
Good, Better, Best : le public est mis à contribution pour ce refrain à la fois entêtant et entrainant, aux sonorités d’Afrique de l’Ouest. Les gens chantent et dansent, Y’akoto semble aux anges.
(Il s’agit d’un autre passage de Y’akoto à la Maroquinerie, en avril dernier, pour vous faire une idée)
Après avoir quitté la scène sous les applaudissements, elle revient pour deux dernières chansons plus calmes, sûrement les plus émouvantes : Truth et Tonight.
Y’akoto parle d’amour surtout, mais aussi de toutes les failles et faiblesses humaines, dans un anglais simple et franc. Elle se livre sans pudeur au public entre deux chansons : « I hate being vulnérable. I’m too weak sometimes, but I guess it’s what being a human is » (« Je déteste être vulnérable. Parfois, je suis trop faible, mais je suppose que c’est ça, être humain »).
Au final, Y’akoto nous a proposé une soul teintée de folk aux influences africaines, des morceaux aux paroles parfois presque simplistes mais toujours attendrissantes, une vraie jolie voix : rien de très original, mais d’une sincérité touchante.