« I love you more than anything ».
Passez une tête de l’autre côté de la Manche, direction London. Dites, à qui voudra bien l’entendre et à qui voudra bien vous écouter, que vous êtes français. Votre interlocuteur est un amateur, plus ou moins spécialiste, de musique ? Il vous parlera certainement, et puisque vous êtes français, de Serge Gainsbourg, le « plus célèbre des artistes frenchy », de sa classe, de son sens aigu de la provocation, de son addiction à la nicotine et à la poésie traficotée, de son côté bordeline. « Mais Gainsbourg, il y avait pas quelque chose de bizarre avec sa fille ? » Connaisseur. « Non pas vraiment, c’est juste sa chanson avec elle qui est provoc’. » Vous vous retrouvez alors à justifier un morceau dont vous ne connaissez pas forcément les tenants et les aboutissants, et surtout, puisque vous n’êtes pas forcément un proche de Gainsbourg, vous n’en savez fichtrement rien, des ambitions du grand Serge sur ce morceau. Charlotte Gainsbourg chante très faux sur « Lemon Incest », était très jeune au moment de son interprétation, et les paroles de cette histoire sont effectivement tendancieuses. Voilà ce que vous savez.
Bref. Les Anglais, Serge Gainsbourg, ils connaissent, ils écoutent, et ils reprennent même parfois. Côté français aussi, mais ce n’est pas toujours excellent (pensons à cette adaptation de Didier Super sur le bien nommé album La merde des autres, reprise sur laquelle on ne dissertera pas deux heures mais qui risque, cependant, de vous faire rire). De « Lemon Incest », il y a désormais aussi cette reprise de Toy, combo psyché, shoegaze, kraut, qui siège du côté de Brighton, là où la mer est froide mais où les Anglais se baignent tout de même.
Papapapa
Sur leur cinquième album en bientôt dix ans de carrière (Songs of Consumption, Tough Love Records), les mecs de Toy reprennent donc ce morceau sorti par Gainsbourg père et fille en 1985, en traduisant quasi intégralement le morceau dans la langue de Jane Birkin (la mère de Charlotte, pour ceux qui ne connaîtraient pas cette partie de l’histoire). « I love you more than anything », entend-on. Seul « Papapapa » n’est pas traduit. Parce que tout le monde comprend ce que « Papapapa » veut dire.
Songs of Consumption by ToyNotons aussi qu’afin d’être le plus fidèle possible à l’original, le groupe s’est évertué à sonner, là encore, le plus faux possible au moment d’entonner ces paroles, qui sonnaient, en français, « L’amour que nous ne ferons jamais ensemble Est le plus rare le plus troublant / Le plus pur le plus enivrant ».
Sinon et si vous n’êtes pas uniquement focus sur ce que vous connaissez déjà, l’album de Toy s’écoute en intégralité par ici.
Visuel © Steve Gullick