On attend que ça morde…
Une constatation du lundi comme il y a des constatations des autres jours: parfois, il convient de s’éloigner un peu pour mieux y voir, ce qui au sens littéral pénalise les astigmates et je m’en excuse.
Ce week-end, je suis partie en banlieue balnéaire parisienne, à Trouville, pour bruiner léger en bonne compagnie, un appareil argentique en bandoulière entre les antiquaires et les café-hôtels Gustave Flaubert. Rimes et poésie à 2 heures de Paris.
Chic, un marché au poisson, ha, la belle daurade, elle vient de Rungis, ben ouais, contrôle oblige, la pauvre gambas a fait l’aller-retour Normandie-Paris, du coup elle est surement plus fraiche sur le marché de la Bastille, c’est bête.
Après tout, ça a quelle tête, un poisson de la Seine?
Il serait même plus frais que l’on croit, le poisson parisien. C’est ce que sous-entend un habitué du coin, alors que je laisse courir mes doigts sur les casquettes de marin à la chaine made in quelque part qui n’est pas normand. Hum? « Street-fishing parisien », il dit.
Désolée si je me réveille, et si ça fait quelques années, mais on me pardonnera de ne pas avoir envisagé qu’il soit possible d’embarquer ma canne à pêche pour me choper une carpe à côté du bateau-phare en attendant l’ouverture de la BNF. Non, je ne pensais pas qu’une petite communauté de parisiens entre 20 et 40 ans s’adonnait à ce joyeux et intriguant plaisir urbain initié apparemment au Japon et en France dans les années 80. Oui, intriguant, après tout, ça a quelle tête un poisson de la Seine?
Selon les initiés, la Seine serait saine, regorgerait d’espèces différentes de poissons….On demande un peu à ne pas voir.
Faut tout de même reconnaître ça à la panoplie hipster : elle élargit le champs des possibles ludiques. Elle applique à n’importe quoi une attitude et une esthétique qu’il serait inutile de détailler, et vous voilà entrain de considérer la possibilité de vous mettre à la street-peinture sur soie, à la street-voiture à pédale, ou la street-danse-bavaroise. Le « street-loisir » qui, avouons le, a ses bons côtés, a aussi de beaux jours devant lui.
Ces nouveaux pêcheurs urbains se baladent en vélo, en skate, en basket, ils se déplacent très rapidement de spot en spot, matériel léger en bandoulière, ambiance taggeur des années 90 avec en guise de posca une canne à bas prix et en guise de trophée, une photo, (On la voit déjà déferler la photo instagram du brochet de Stalingrad). Quant au poisson, on le rend, choix de mot judicieux, à la Seine, car la donne est au « No kill » quand on pratique le « power fishing » (forcément, on s’y attendait, ça s’anglicise).
La photo instagram du brochet de Stalingrad
Enfin, ils diront ce qu’ils veulent ces nouveaux « chasse et pêche » trendy, ils peuvent assurer, ambiance Chirac années 80, que la Seine, on pourrait manger dedans. Désormais, la question « C’est un poisson d’eau douce? » a intégré mon vocabulaire de cliente de restaurant parisien. Tant qu’on y est, exit le pigeon, on commence à être à court de loisirs un peu ringards à réactualiser, alors qui sait quand débarquera le « street hunting »…
Pour approfondir le mouvement qui, tel un gentil brochet (vous l’aurez remarqué je ne connais que deux poissons d’eau douce), bref, pour penser la discipline qui, telle une jolie carpe, s’est déjà fait prendre au leurre de la régularisation, c’est là.
Et pour aller tater du goujon (et hop, un de plus), quelques conseils ici.
Et demain, mercredi, c’est la traditionnelle Fishing School pour les enfant présentée par la FTF(French Touch Fishing, ouais ouais) au canal Saint Martin entre midi et deux pour un centre de Paris aéré…
« Que celui qui n’a jamais péché jette au poisson la première pierre ! »Francis Blanche