L’art de Noé, ou quand les animaux viennent à la rescousse de l’art
Au moment où les courants artistiques sont explosés, où la technologie, mais aussi la « retromania », où les délires individuels ont envoyé l’art aux quatre coins de l’univers mental, découvrir une vraie tendance répétée relève quasiment du défi.
Ces dernières décennies montrent dans l’Art contemporain (minimal, conceptuel, installations, constats et autres démarches…) une répétition du thème ANIMAL !!!
Une vieille obsession datant de l’antiquité (Mésopotamie, Grèce, Egypte..) où l’on déifiait nos amies les bêtes en grand, puis au Moyen Âge les gargouilles et les animaux de la Bible sur les cathédrales, et enfin les monstres des enfers, suivis par les portraits des collections d’animaux de races croisées des ménageries des princes (chiens, chevaux, oiseaux rares..) ; puis restait l’entomologie et quelques bronzes assez gothiques, avant que les temps dits modernes ne tuent l’inspiration avec les élevages en batteries et les abattoirs industriels.
Dès les années 70, Nikki de Saint Phalle bâtit des animaux géants et colorés: oiseaux, dragons, serpents, comme une ode enfantine à la nature, aux créatures… ( voir ci-dessous la fontaine du centre Pompidou).
A l’inverse, Joseph Beuys se fait enfermer à New York avec un coyote, après avoir refusé de fouler le sol américain, en symbole de protestation contre la destruction de l’Amérique indienne et sauvage.
Gilles Aillaud ne peint que des animaux tristes, affalés dans des ménageries en béton sous des néons : un constat Kafkaien !
Gloria Friedman reconstitue un coin de nature avec un cerf, en plein musée, et invoque ces « représentants » (comme elle les appelle) en voie de disparition. Les allemands ont toujours été plus attentifs que les autres à la nature.
William Wegman ne photographie que ses chiens ( des Braque de Weimar), comme des mannequins et modèles de revues, mais aussi comme des miroirs ridicules de nous-mêmes et de notre civilisation narcissique.
Les chats d’Alain Sechas ou les caniches et homards de Jeff Koons sont tout aussi Kitsch et dérisoires… Un peu comme les cochons tatoués de Wim Delvoye.. dont il vendra carrément la peau par la suite !!
Barry Flanagan propose des lapins en bronze qui folâtrent en dansant, façon Bugs Bunny.. Caricature des statues des parcs et jardins typique de l’humour anglais.
Benoit Huot surdécore des animaux empaillés, entre carnaval mexicain et chamanisme.. Les grigris élevés au rang d’expression artistique.
Elisabeth Mc Grath crée un bestiaire imaginaire et fantastique d’animaux impossibles en porcelaine, entre époque victorienne et décoration gothique, pour l’amour des cabinets de curiosités.
Kate Clark reconstitue des cervidés à face humaine qui nous regardent fixement , de l’autre côté d’une manipulation génétique, genre île du docteur Moreau.. Face à nos interfaces avec la nature.
Thomas Grunfeld recolle beaucoup de mammifères avec des têtes d’oiseaux naturalisées, comme des monstres issus de la chirurgie, des Frankenstein animaux ? Les horreurs de la chirurgie plastique.
Damien Hirst a tranché de vraies vaches et requins en coupe , histoire de choquer avec des pièces quasi impossibles (financé par Saatchi : art industriel).
Xavier Veilhan au contraire a stylisé chevaux et requins comme des avions furtifs. Haute technologie et métal. L’animal-machine.
Dernier arrivé dans la galaxie art moderne et animaux : Chen Wenling (image d’illustration), après avoir multiplié des cochons obscènes, genre carnaval, il vient de produire grandeur nature, en résine, un Hippopotame volant et un taureau à réaction…
Les raisons de ces artistes ne sont pas toujours claires, et parfois même inexistantes.. Mais la gène coupable et la folie humaine meurtrière qui tourne autour du monde animal passif et silencieux, beau et mystérieux, restent palpables à travers tous les siècles !!!
PS : il y a encore bien des exemples, dans le monde entier… A suivre
Parisiens, allez voir les nouveaux animaux underground à la Halle de la Villette à l’expo Hey ! (voir notre galerie)