C’est au 104, à Paris, que la fondation Tara Océans a décidé de dévoiler les œuvres qui sont nées sur son voilier depuis 20 ans. Chacun leur tour, peintres, photographes, ou encore plasticiens sont partis en expédition avec les scientifiques qui y travaillent. Leur but : s’imprégner de leurs recherches pour qu’un public éloigné puisse voir ce qui s’y passe.
Saviez-vous que lorsque l’eau est verte, elle n’est pas plus mauvaise que saturée de vivant ? C’est ce que Nicolas Floc’h raconte sur un mur aussi grand qu’une piscine. De gauche à droite, les nuances de rouge laissent place à celle de vert pour raconter les différentes saturations de micro-organismes dans la Seine. « Quand c’est rouge, cela indique qu’on est proche d’une forêt », explique Sébastien Ruiz, secrétaire général de la fondation Tara Océan. L’artiste exposé a utilisé les relevés des scientifiques à bord de la goélette de la fondation, un voilier à plusieurs mats, pour que les saturations de couleurs qui en ressortent racontent les cours d’eau sous un prisme autant colorimétrique que scientifique. Pour la première fois, ses pairs et lui sont exposés dans un seul et même espace pour que le public découvre leurs œuvres, nées d’expéditions sur le même moyen de locomotion.
Vulgariser le travail des scientifiques
« Ils exercent des métiers qui sont normalement solitaires », souligne Sébastien Ruiz, à propos des marins, des scientifiques et des artistes qui ont cohabité sur la goélette de Tara. Depuis 20 ans, lorsqu’Agnès B. et son fils ont acheté le bateau avant de le donner aux institutions publiques en 2016, des artistes ont été invités en expédition, pour s’imprégner du travail d’utilité publique menée par les chercheurs à bord. Le secrétaire général de Tara Océan poursuit : « Ça a marché, car les scientifiques voient les artistes comme un medium pour faire comprendre à un autre public ce sur quoi ils travaillent. »
Parler de dépression de l’eau peut être difficile à comprendre pour un public non sensibilisé aux sciences. En revanche, raconter la mer avec des morceaux de plastique trouvés dans des zones très polluées marque davantage le public. À l’aide de touillettes pour le café, de filtres à évacuation d’évier ou encore de brosse à vaisselles, l’artiste Manon Lanjouère rend familières les espèces qui peuplent les océans, car les formes présentées sont populaires. Ce sont des objets de la vie quotidienne.
Brigitte, bruxelloise, en tire un message d’alerte. « On est obligé de voir que ce qui est beau devient laid à cause de la pollution. » Son ressenti est l’effet escompté par la fondation. Sébastien Ruiz est clair sur l’organisation de l’exposition : « On a fait le choix de mettre paysage et vivant au même endroit, pour que le public puisse voir et s’émerveiller de ce qui se passe dans l’eau, explique-t-il. Une fois qu’ils ont vu ce décor, les conséquences de la pollution leur sont présentées pour qu’ils se sentent davantage impliqués. »