N’emmenez pas vos amis au ciné, apportez le cinéma à vos amis avec les DVD de Jacques Tourneur
Il faut le dire et le répéter : le cinéma est un artisanat.
De l’éclairagiste à la costumière, du son au cadre et du décor au montage, tout n’est que peaufinage, métier, soin et application. Chaque fois qu’un film atteint le sublime, les artisans sur le plateau, mais aussi bien, avant, scénaristes et répétitions, acteurs et directions, plan et story-board ont été chiadés, inspirés, préparés avec minutie et expérience. L’argent n’y fait rien. C’est le métier et l’expérience qui emportent le morceau.
Pas un chef d’oeuvre dont on ne vante l’équipe : du producteur au chef op, des acteurs aux directeurs et scénaristes. C’est comme la cuisine ou la couture, il n’y a pas de miracle, juste de la science.
Jacques Tourneur a eu cette chance. Naître au milieu d’un atelier de fabrication : fils de Maurice Tourneur, cinéaste réputé des années 20 ,30,40… Il va comme son père tourner aux Etats-Unis et réaliser des films qui vont tranquillement s’installer dans l’histoire du cinéma.
En pleine époque de mélos hollywoodiens, il va opter pour des films fantastiques, catégories film d’angoisse. Il existe un marché à part: King Kong, Chasses du Comte Zaroff, Dracula ou Frankenstein… Genre plus ou moins méprisé, mais qui a du succès auprès du public .
Le cinéma populaire de genre va s’imposer grâce à son inventivité, ses délires, son suspens, l’action et une certaine folie démesurée.
Jacques Tourneur avait fait un hit en dirigeant La Féline, sublime thriller dans lequel une fille devient panthère et tue. Une scène dans une piscine couverte, de nuit, avec reflets et clapotis, avait marqué les esprits.
Les producteurs lui en demandent aussitôt deux autres : L’homme léopard et Vaudou. Deux modèles que tous les étudiants en films devraient avoir sur leur table de travail.
Petits Budgets, petits tournages. Ni temps, ni moyens, ni stars … Au départ ces films semblaient être condamnés à être des séries B. Et voilà que Jacques Tourneur et son équipe vont les transformer en chefs d’œuvres. Véritables bijoux du noir et blanc, ciselés et précis comme des diamants.
Héritées des films expressionnistes (Allemands puis polars) à la Fritz Lang, ces histoires sont éclairées avec une sorte de magie. Les acteurs sont très classiques : de jolies filles minces, un peu mannequins, des beaux mecs virils et élégants, des dialogues ultra sobres, des scènes courtes ou l’histoire avance à grands pas.
Il y a un côté inexorable, un peu comme dans Hitchcock, mais sans aucun grand guignol, ni psychologie à l’Américaine, encore moins de psychanalyse à deux sous. Non, là on voyage plutôt dans le destin, l’irréversible, où l’horreur et les meurtres sont au même niveau que le reste des scènes.
Tout fait un peu peur, presque chaque scène est inquiétante…Le tout à un rythme plutôt lent, comme s’il fallait se pénétrer de chaque scène. Pas de temps mort, pas de quartier dans ce slow motion. Le découpage tombe comme un couperet. Chaque étape vous assène comme un coup. Juste ce qu’il faut de bizarre, de décalé.
D’histoire simple, le film devient hypnotique. Beaucoup de noir, d’ombre, de nuit, de choses cachées. Décors ultra évocateurs et des cadrages incroyables: classiques mais fascinants, avec des angles rares, un peu au-dessus, ou éloigné.
Il y a un truc, mais on ne sait pas quoi.
Les critiques et Vicente Minnelli lui ont rendu hommage en disant que c’était l’utilisation du noir total, dans lequel le spectateur imagine plus que les meilleurs scénaristes ou réalisateurs. Mais cela ne suffit pas à expliquer le charme général. Comme un cocktail très dosé, les films de Jacques Tourneur vous pénètrent insidieusement, goutte après goutte…
Incroyable science de l’intoxication avec des images noir et blanc.
Godard a dit que le cinéma, c’était ça: des ombres, des fantômes, à une certaine vitesse. Et Jacques Tourneur est un des maîtres discret de cette alchimie.
2 DVD Montparnasse vidéo ( Collection RKO) 10 euros pièce !
L’homme léopard ( Leopard man) et Vaudou ( I walked with a zombie)