Le boss du mag Oz raconte ses mémoires dans « Hippie Hippie Shake », un récit chaotique
Richard Neville fut l’éditeur de Oz, magazine satirique australien de 1963 à 1967 et exilé à Londres de 1967 à 1973 : Oz devint un organe de la Free Press, chantre de la libération et de la contestation.
Actuel, le magazine – parrain de radio Nova – fut influencé par Oz (et I.T, International Times) dans sa version free et underground de 1970 à 1975 (avant de devenir le magazine de reportage tel qu’il le sera de 1980 à 1995.)
Voilà pourquoi je vous en parle.
Neville a raconté ses mémoires dans un récit chaotique mais détaillé : Hippie Hippie Shake. Et effectivement l’auteur donne bien le sentiment que l’époque 1967-73 ressemblait à un immense shaker dont les hippies ressortaient secoués (de la tête), rincés (du corps), puis essorés (du portefeuille)…
Dans ce livre, vous trouverez des récits détaillés, échevelés et salement ironiques :
- Le concert des Stones à Hyde Park pour la mort de Brian Jones, avec des skins dans les arbres bombardant les hippies de canettes de bière.
- Une représentation du Living Theatre, ou la tribu débridée et nue va cracher sur le public (puis s’autocracher), se battre avec tout le monde et avec Judith Malina, compagne de leur leader Julian Beck !
- Ou comment les pionniers d’Ibiza, arrivés vers 1969, finissent tous avec une blennorragie carabinée. Et aussi le festival de l’île de Wight, entre boue, famine et jacquerie …
Bref Neville n’y va pas avec le dos de la cuiller.
Mais après le psychédélisme, le LSD, les pilules et les gros joints ont explosé les cerveaux ; les anciens planants sont devenus contestataires et provocateurs fous, réclamant les concerts et la drogue gratuits, et le sexe généralisé y compris avec les très jeunes …
Le chemin parcouru, en à peu près 5 ans, entre les Mods straights, dandies et speedés, et ces bandes de Freaks sales et affamés, était en train de boucler la boucle de l’échec complet.
La justice anglaise alternait alors les saisies, puis les procès pour cette Free Press, accusée d’attentats à la pudeur et de bafouer toutes les valeurs morales. Tout cela tournait au cirque médiatique.
Mais le fond le plus dur et méchant de ce livre est de nous dire qu’au milieu de toutes ces exigences de révolution et de liberté, les hippies s’arnaquaient entre eux, se volaient et se maltraitaient ! Les couples étaient des désastres et la plupart devenaient crasseux et intenables, irrespectueux de leurs propres compagnons, des monstres de prétention qui n’assuraient plus rien au quotidien. Les FREAKS.
Une partie, même des leaders des mouvements de contestation, avaient perdu la raison et emmerdaient tout le monde avec des déclarations folles, des revendications barrées ou des utopies absurdes. Et c’était encore pire aux US qu’en Europe ou à Londres : les flics abattaient carrément étudiants, black panthers et weathermen au cours d’émeutes et autres réjouissances.
(on se souvient de la simple histoire de George Harrisson qui veut visiter Haight Ashbury à San Francisco et finit par s’enfuir devant la marée de mains tendues, de zonards, arnaqueurs et zombies, pire qu’à Calcutta !!)
Ne soyez pas choqués, si les sixties violentes et dures ont été médiatisées en « Flower Power », c’est pour l’intox et pour la postérité. La réalité était inimaginable même pour beaucoup à l’époque, et ces livres de souvenirs durs et lucides qui ressortent les cadavres du placard…
C’est d’autant plus fou que le public et les médias finissaient par donner raison aux hippies, forcément cools et bien intentionnés. La réalité étaient plus dure, égoïste, anarchique et fit de nombreuses victimes.
A lire en face !
_ Hippie Hippie Shake
Rock, drogues, sexe, utopies. Voyage dans le monde merveilleux des Sixties
Editions Rivages Rouges, 11 €