Taxi Driver comme vous ne l’avez jamais lu
On s’offre Travis Bickle dans le Gift shop du grand mix (16h chaque jour), ou plutôt ses pensées.
Qui est cinéphile attentif se souviendra de ces rares scènes du film de Scorsese dans lesquelles Travis note frénétiquement des choses dans un carnet. Ce carnet, c’est le roman Taxi Driver du poète Richard Elman, traduit pour la 1ere fois en France par Claro et sorti aux éditions Inculte.
Le héros tout en crête de Taxi Driver a de drôles de pensées, des songes éveillés qui tournent et virent, s’enchevêtrent et se croisent dans sa tête comme les rues nocturnes qu’il parcourt, défoncé au reds au volant de son taxi. Ce sont les rues d’un new York infernal, projection urbaine de ses folies héritées du Vietnam, cité fantasmagorique et cloaque où prennent vie des démons à forme humaine.
Des pensées hachées, hantées, insomniaques, elliptiques et précises à la fois qui forment une poésie hallucinée, essence, sang et larmes de 174 pages à la genèse unique.
Le Poète Richard Elman a écrit le roman en parallèle de la rédaction du scénario de Paul Schrader en 1974. Ce n’est donc pas une adaptation mais une tangente, une autre rue plus obscure pour la même destination.
Le Taxi Driver qui se feuillette est un amas de choses et d’autres réparties en chapitre dont les titres anecdotiques – « Travis au travail », « Derrière le volant », « Travis s’organise », ne font que renforcer la poésie délirante du contenu.
Ici, la violence obsessionnelle est indissociable d’un irrépressible besoin d amour à côté de la plaque. Sa fameuse veste militaire sur le dos comme une seconde peau, Travis refuse pourtant d’évoquer Le « nam » qui l’a brisé. La guerre est réduite à une présence toxique, permanente tel un gaz létal et invisible. Qu’à celà ne tienne, Travis est déterminé à donner, ultime recours contre une solitude profonde qui le fait ressembler aux fantômes qui l’entourent
Tout se floute alors et la mort devient la forme ultime du don.
Les pensées tournent et bourdonnent de plus en plus vite, comme des mouches enfermées dans un bocal et qu’on regarde s’affoler ; immobile entre crainte et pitié on hésite à ouvrir le couvercle.
Oui, de la poésie à la folie il n y a qu’un pas de porte que Richard Elman franchit résolument, mais la porte ne ferme pas, le verrou est cassé, et alors qu’elle claque au vent des bribes de beauté s’en échappent, d’autant plus sublimes et déchirantes qu’inattendues et subites.
« Puis je me suis barré, les saletés de sirènes de police braillaient comme des bébés déments »
Travis aurait pu être écrivain, il n’est que rêveur de cauchemar dans un monde qui reconnaît le meurtre comme salut
TAXI DRIVER, sort en édition poche le 9 octobre 2014
Il existe également aux Editions Inculte, traduit par Claro : 16,90 euros avec une pensée toute particulière pour la superbe couverture de Yann Legendre
Une spéciale Taxi Driver vous attend dans la Nova Book Box de CE SOIR..
ATTENTION SPOILER :
Niet, pas de ça dans le roman, à l’écrit le culte se passe ailleur…