Le lancement prochain d’une revue scientifique spécialisée dans la pornographie devrait permettre de mieux comprendre La Chose
« T’as pris quoi comme option cette année ?
– Porno
– ah, toi aussi ? »
Ce dialogue imaginaire entre 2 étudiants de fac pourrait bien se produire réellement d’ici quelques années. Pourquoi ?
A en croire The Guardian, le Royaume-Uni serait en passe de créer une nouvelle discipline académique. Après les cultural et les feminist studies nées dans les années 60, ou les postcolonial studies nées dans les années 80, voici les Porn studies, les études pornographiques.
La maison d’édition britannique Routledge s’apprête en effet à lancer le premier périodique entièrement dévolu à la cause pornographique. Pour faire bonne figure, la revue sera dotée d’un comité de lecture ; la scientificité de chaque article étant soumise à une évaluation par les pairs de l’auteur. Cette revue, non pas coquine, mais sur le coquin, se veut d’ores et déjà internationale. Elle entend « explorer de manière critique les produits et services culturels désignés comme pornographiques ».
Si le quotidien britannique semble suggérer une relation de cause à effet entre le succès mondial de la trilogie Fifty Shades of Grey (EL James) et la naissance de ce périodique, force est aussi de rappeler que la pornographie a littéralement envahi nos sociétés avec la démocratisation d’internet, du streaming… etc.
Chantre low cost du fast orgasm, de la jouissance rapide et à moindre frais (le kleenex demeurant une denrée abordable) le porno diffuse dans toutes les couches, genres, classes de la société : il se « banalise » et engendre une « décomplexion » croissante de ses « consommateurs » selon un sondage de l’Ifop de 2009.
Pas étonnant dans ce contexte que des organes éditoriaux et, demain peut-être, des filières universitaires, s’emparent du sujet pour en faire un champ d’études à part entière. Sociologues, philosophes, criminologues, spécialistes des médias, des TICs et des études de genre auront ainsi le loisir de s’emparer publiquement de ces problématiques licencieuses.
De vives oppositions sont d’ores et déjà à prévoir entre les tenants d’un porno émancipateur (de la femme, de sa sexualité, de l’onanisme…) et ses pourfendeurs qui y voient bien plutôt le symbole d’une perpétuation de la domination masculine / phallocratique.
En tout état de cause, le lancement de cette revue a le mérite d’ouvrir le débat sur un point (paradoxalement) aveugle de nos pratiques contemporaines…