Avec son titre « Boa Noite » Karol Conka fait plaisir à plusieurs générations en mixant cantoria, forme de chanson traditionnelle du nord est du Brésil, et rap dans un morceau dansant.
C’est important de faire plaisir à mamie, et ça Karol Conka l’a bien compris. La brésilienne aime chanter, rapper, faire danser les gens, mais elle veut aussi régaler sa grand-mère en utilisant des sons traditionnels brésiliens, qui ont bercé l’aïeule dans son enfance. Avec son album Batuk Freak, la rapera a malaxé les genres en alliant méthodes de production actuelles et cadences puisées dans les traditions pour un résultat qui fracasse les dancefloors brésilien et du reste du monde à sa sortie, au milieu des années 2010.
Batuk Freak est un assemblage de rythmes fous (c’est à vrai dire le sens littéral du nom, comme elle l’expliquait au micro du Mellotron), des bruits piochés dans la bande-son des secousses qui agitent le Brésil, mélangée au rap et au baile funk qui tambourinent les sound systems locaux. C’est une salade de fruits ou l’on croque de tout, tant que c’est bien frais, et bien juteux. Pour « Boa Noite » morceau phare du disque, Karol Conka avait demandé au producteur Nave d’utiliser des samples venus du nord-est du Brésil, en particulier la cantoria aussi appelée repente. C’est ce patrimoine sonore-là qui plait à la grand-mère de Karol Conka.
La repente est une tradition orale poétique prenant la forme de joutes verbales improvisées entre chanteurs brésiliens, les repentistas. Ce qui est drôle, c’est que la pratique des repentistas, amenée par des sessions en groupe lors desquelles un texte est improvisé à partir d’un thème lancé par la cantonade, est une manière de créer collectivement que l’on retrouve dans le rap, dans les freestyles que l’on peut composer en se basant sur des thèmes ou des mots proposés par une audience. Avec son « Boa Noite » inspiré du repentismo, Karol Conka a donc associé pratique du rap et pratique ancestrale, bien fait plaisir à mamie, et le truc cool, c’est qu’on en profite aussi.