« Klimperei », à la base, c’est un mot allemand qui en français veut dire « pianotage ». Pianotage ? C’est un peu péjoratif, non ? En réalité, c’est plutôt… poétique. Car pianoter, c’est ne pas se soucier du professionnalisme, c’est laisser la musique venir comme elle veut, c’est le contraire de la frime. Un état d’esprit qui correspond à celui qui, depuis les années 80, compose de la musique sous ce nom là (et sous d’autres, d’ailleurs). Christophe Petchanatz, musicien insolite et expert – vous allez l’entendre – en géographie croix-roussienne, était dans le dernier Réservoir de la saison.
Des artistes musicaux singuliers, il y en a quand même un certain nombre à Lyon, et cette première saison du Réservoir nous aura permis d’en (re)découvrir certains. Parmi eux, une figure assez secrète du paysage musical lyonnais, peu férue des lumières, mais néanmoins prolixe et surtout boulimique de composition (allez regarder sa discographie, vous comprendrez) : Christophe Petchanatz, alias Klimperei.
Et comme son métier d’aide-soignant à domicile lui a permis d’acquérir une connaissance rigoureuse des rues et des parcs de son quartier, la Croix-Rousse, il a choisi de balader Antoine parmi quelques jardins méconnus du coin. D’abord, le parc Francis Popy, du nom d’un compositeur lyonnais oublié de la Belle Epoque, cadre idéal pour évoquer les diverses influences françaises et européennes de Klimperei, groupe pendant longtemps composé de Christophe et de son ex-femme Françoise Lefebvre. Leur premier album When Memories Began To Fade, sorti en 1987 sur le label cassette lyonnais Underground Productions tenu par Eric Chabert, qui mélange piano et instruments pour enfants, les fait alors connaître dans un cercle underground.
Depuis, l’étiquette « toy music » colle à la peau de Klimperei, alors même qu’un certain nombre de morceaux composés par Christophe, en solo ou avec Françoise, ne peuvent se réduire à cette dénomination. En revanche, Antoine se risque à une hypothèse : Klimperei ne serait-il pas un précurseur de la bedroom pop ?
Ce qui est sûr, c’est que Christophe a vécu l’aventure des débuts du mail art, cet art postal DIY essentiellement pratiqué à l’époque par des artistes transdisciplinaires, trempés dans la musique, la poésie, le fanzinat. Un art éphémère, périssable, qui fait écho à la tendresse que Christophe porte aux ruines, aux choses délabrées. D’ailleurs, c’est à l’ombre de la Villa Chazière, grande et luxueuse maison bourgeoise abandonnée au centre du parc du même nom que Christophe se souvient de ses nombreuses correspondances épistolaires, et des surprises qu’il découvrait, presque chaque jour, dans sa boîte aux lettres.
Enfin, à quelques dizaines de mètres, sur un banc du jardin d’Ypres, Christophe détaille son rapport viscéral à la musique. Ou plutôt : à la composition musicale, qui bien plus que l’écoute musicale, est depuis très longtemps l’un de ses besoins vitaux. Sa discographie serait-elle donc déchiffrable comme un journal intime ? « Non » semble d’abord répondre Christophe. Quoique ?
TRACKLIST :
- Klimperei – Je M’Souviens
- Francis Popy – Les Frissons
- Les Poppys – Non Non Rien N’A Changé
- André Popp – Alors quoi, Marika ?
- Nino Rota – The Godfather Waltz
- Béla Bartók – Romanian Folk Dances, SZ.56 : III. Andante
- Faust – Krautrock
- Klimperei – Lola Petit Chagrin
- Los Paranos – AZ 2/I
- Klimperei – La Fin Des Vacances
- Clairo – Pretty Girl
- Klimperei – For Friends (Yes, You)
- Klimperei – Salut !
- Klimperei – Serpentins
- Klimperei – UVB-76
- Klimperei – SA(LA)D