Le deuxième album de la Goodie Mob, moins convaincant pour son public que l’excellent premier Soul Food, contenait un titre au froid mordant, métaphore de la misère qui pousse les défavorisés à glisser.
Goodie Mob, ça ne vous dit peut-être rien et pourtant vous connaissez certains membres du groupe. Et oui, Cee-Lo, moitié du duo Gnarl Barkley, derrière le hit « Crazy », Big Gipp, T-Mo et Khujo forment la Goodie Mob, un groupe de la même écurie qu’Outkast, duo légendaire de Géorgie, le crew de rap souterrain et pionnier du Dirty South, la Dungeon Family. En 1998, la Mob publiait son deuxième opus, Still Standing.
The South has something to say
Même écurie, approche différente. Si la vibe d’Outkast peut évoquer une discussion animée autour d’un barbecue ensoleillé, l’ambiance Goodie Mob ressemble davantage à celle de la conversation où l’on refait le monde en partageant ses problèmes, jusqu’à tard dans la nuit.
Par ses textes, la Goodie Mob s’intéresse aux combats idéologiques que mènent chaque jour les afro-américains, celui d’hommes et de femmes descendant d’esclaves. Ce disque remonte l’histoire de ceux qui vivent sur la terre où leurs ancêtres ont été privés de liberté, et qui continuent des siècles plus tard à en subir les stigmates.
C’est un sujet lourd, une vision unique de ce que ça signifie d’être noir aux États-Unis, un point de vue singulier de l’identité américaine. Les textes de la Mob sont remplis de références à la culture afro-américaine : la soul food (plats typiquement afro-américains comme les “collard greens”), les croyances de ces communautés… des thématiques devenues des repères récurrents dans le rap « conscient » afro-américain. L’album reflète le quotidien des membres du groupe et décrit la vie de jeunes issus des strates les plus pauvres de la société. On l’entend particulièrement dans le single « Black Ice (Sky High) ».
Black ice, (sky high)
En anglais, « Black Ice » désigne le verglas invisible, perçu comme noir, car il recouvre l’asphalte des rues de la ville. C’est ce piège qui nous fait glisser, perdre l’équilibre, sombrer, mais aussi ce froid mordant qui représente l’aspect impitoyable et omniprésent de la misère. Un verglas qui peut envelopper une ville et transformer ses rues, en les rendant si glissantes qu’il devient difficile de se tenir debout, d’être droit dans ses bottes. Mais nos emcees sont bien là, Still Standing.
« Black Ice (Sky High) » c’est une vague de froid venue du sud, loin de la musique sensuelle et fun qu’on associe souvent au Dirty South (Une expression créée par le groupe dans leur album précédent). Un album collé à une réalité glissante que vivent beaucoup de jeunes afro-américains et où la chute semble parfois inévitable.