Dans les années 90, Lord Funk était considéré comme le meilleur « dealer de samples » au monde, approvisionnant le gratin des producteurs américains de disques obscurs, souvent français, qu’ils n’avaient alors jamais entendus.
Dans l’histoire du hip hop, malgré les idées reçues, l’influence n’a pas été à sens unique entre les États-Unis et la France.
Lord Funk est Français, inconnu du grand public, mais ses trouvailles vinyliques ont créé les sons les plus mythiques du rap. Dans les années 90, il était considéré comme l’un des meilleurs »dealers de samples » au monde, approvisionnant le gratin des producteurs américains de disques obscurs, souvent français, qu’ils n’avaient alors jamais entendus.
En chinant au fin fond des campagnes de l’Hexagone, le funky boy de Rosny-sur-Seine a contribué à sculpter les plus gros tubes de « l’âge d’or » du rap, des Beatnuts à Fatboy Slim en passant par Lord Finesse ou DJ Spinna. Surtout, ses pépites arrachées à la poussière et à l’oubli ont donné une seconde vie hip hop insoupçonnée à Serge Gainsbourg, Georges Jouvin, Daniel Janin, Vladimir Cosma ou au mari de Line Renaud.
Épisode 1 : King of New York
New York, au milieu des années 1990. Le milieu du rap ne bruisse que d’un nom : Lord Funk. Derrière ce pseudonyme : un mystérieux vendeur de disques, Romain Dalmasso de son vrai nom, boulimique de musique originaire des Yvelines.
Au comptoir de la boutique A-1 Records à East Village dans Manhattan, le Français est devenu une légende dans le milieu du digging — la recherche de disques rares. Pete Rock, Dj Premier, DJ Muggs, Dj Spinna, Q-Tip, Fatboy Slim… si les plus grands producteurs s’arrachent ses services, c’est parce que ce magicien de la Chine à l’art de débusquer les vinyles que personne d’autre ne connaît, et qu’il a l’oreille pour y dénicher des samples — ces boucles musicales de quelques secondes qui forment la colonne vertébrale des instrumentaux rap de l’époque.
Son secret ? Sa Frenchitude ! Parce qu’il a osé fouiner au fin fond des campagnes de l’Hexagone pour y dénicher des disques improbables, Lord Funk va devenir le roi de New York.
Épisode 2 : Note son nom sur ta liste
Bien avant de réussir à devenir une légende du digging à New York, Lord Funk a débuté sa carrière de junkie du vinyle bien loin du East Village : près de Mantes-la-Jolie, dans la lointaine banlieue parisienne du début des années 1980.
Le 9 novembre 1981, les radios locales sont enfin autorisées à émettre sur la bande FM, après des années dans la clandestinité. Partout en France, des stations fleurissent et des musiques jamais entendues sur les ondes ouvrent les oreilles de millions de jeunes, qui enregistrent ces nouveaux sons sur cassettes.
C’est le cas de l’ado Lord Funk, qui ne se nomme alors que Romain Dalmasso et découvre un genre musical dont il tombe amoureux : le funk de ce début des années 1980. Cette révélation va changer le cours de sa vie et lui offrir ses premiers pas dans le business du disque.
Épisode 3 : La formule du baron
Phénix sachant toujours renaître de ses cendres, le légendaire dealer de disques français Lord Funk n’a pas toujours été le King of New York à qui tous les producteurs de rap font les yeux doux. En 1993, après la fermeture forcée de sa boutique de disques à Paris pour cause de service militaire obligatoire, il traverse une grosse période de doute. Mais le digging reste sa vie.
Pour survivre, il décide d’écumer les petites routes de France pour exhumer les disques oubliés là où ils se trouvent : sous des tonnes de poussière, au fin fond des cambrousses. C’est une Révélation : sur une tonne de vinyles mangés par les rats, il y a toujours une pépite.
Lord Funk découvre que l’Hexagone sut parfois être très funky, et que certains disques franchouillards camouflent des samples insoupçonnés. Désormais à la tête d’une collection unique au monde, il va faire renaître son business à New York, en vendant ses trouvailles aux plus grands producteurs de rap.
De Rosny-sur-Seine au East Village avant son retour forcé en France en 2001, le Lord du Funk est aujourd’hui passé de l’autre côté du miroir : de dealer de samples, il a fini par devenir producteur. Il dévoile la formule secrète dans ce dernier épisode.
Un podcast produit par Radio Propaganda pour la Philharmonie de Paris dans le cadre de l’exposition Hip-Hop 360, en partenariat avec Radio Nova. Écriture : Sébastien Carayol et Franck Haderer. Réalisation : Franck Haderer. Voix off : Bintou Simpore et Karine Bonjour. L’exposition Hip-Hop 360 est à découvrir jusqu’au 24 juillet 2022 à la Philharmonie de Paris.