La très grande saga de Radio Nova racontée par celles et ceux qui l’ont vécue et ambiancée à l’antenne ou dans la savane.
En 2011, Nova débarque au festival de Cannes en compagnie d’une bande de jeunes espoirs masculins, dont Giulio Callegari, futur co-créateur de la série télé Validé, qui à l’époque signe pléthore d’articles pour Novaplanet.com dans un bureau du web partagé avec Adrien Gingold et Christian Nzonta. Le temps d’un sketch cruellement drôle et bourré de mépris pour la vieillesse, empruntant le ton déjà fort emprunté de Godard dans le film du même titre, Giulio se plaint de ces seniors qui rabâchent à toute heure que « c’était mieux avant ». Cette rengaine, rincée jusqu’à la glotte, notre antenne ne finit jamais d’en faire les frais – alors que de nouveaux talents sont accueillis à bras ouvert chaque saison, parfois sans expérience radiophonique, sur la foi d’une énergie, d’une idée, d’une voix, d’une envie. Alex Masson, juré cette année-là de la Semaine de la Critique (qui récompense d’un grand prix le brillant Take Shelter de Jeff Nichols, à propos d’un ouvrier terrorisé par des visions d’apocalypse imminente), est ainsi contraint de vivre en colocation avec un écrivain-journaliste bavard et exalté, Richard Gaitet, qui seconde Marion Armengod au booking des invité·e·s et participe aux plateaux collégiaux de L’Eléphant effervescent animé sur la plage par Mélanie Bauer avec… David Blot, de retour sur nos ondes après des centaines d’heures de fête, Respect. Quatre mois plus tard, Richard mettra en marche les rouages d’un « juke-box littéraire » nocturne et quotidien, sa Nova Book Box, qui donne à entendre des extraits de romans, des bouts d’essais, de la poésie, des bizarreries ou de la BD, des classiques et de la nouveauté, une « machine à lire » qui s’évertue à balancer des tranches de littérature aussi variées, exigeantes et inattendues que la playlist de la station, et qui durera neuf ans.
Pendant ce temps, le printemps parle arabe car le Moyen-Orient s’embrase dans le sillage de la révolution tunisienne, qui force Ben Ali à quitter le pouvoir. D’autres peuples reprennent le slogan « Dégage ! » et parfois, bsahtek, ça marche. En Egypte, démission du président Moubarak, en place depuis 1981. Au Yémen, le président Saleh est chassé de son palais après trente-trois ans de règne. Une guerre civile éclate en Lybie et aboutit au lynchage de Kadhafi, mettant fin à quarante-deux ans de tyrannie. La contestation s’intensifie en Syrie, mais la répression orchestrée par Bachar el-Assad n’en est que plus brutale. Idem au Bahreïn, où le roi Hamad reste vissé sur son trône. Sur Nova, certaines nuits se font l’écho de ces protestations, ou prennent le temps d’explorer des « Sujet(s) » comme la boxe ou le hacking (avec le concours de comédien·ne·s aussi follement marrant·e·s que Fred Tousch et Diane Bonnot).
C’est aussi l’année où la population mondiale atteint… sept milliards, tandis que Lars von Trier imagine que la Terre s’apprête à être percutée par une planète nommée Melancholia. La mélancolie nous étreint en apprenant la mort de Gil Scott-Heron et d’Amy Winehouse, définitivement back to black. Suite à la publication des caricatures de Mahomet, un incendie criminel se déclare à Charlie Hebdo, qui termine l’année en clamant « Bon débarras ! » après l’assassinat de Ben Laden au Pakistan, l’incarcération du président Gbagbo en Côte-d’Ivoire ou l’arrestation de DSK à New York pour agression sexuelle. Surprise : Joeystarr nique les pronostics en jouant un keuf bouleversant dans Polisse de Maïwenn, qui reçoit le prix du jury à Cannes. Pas surprise : Kim Jong-il succède à Kim Il-sung en Corée du Nord. Kavinsky accompagne les virées automobiles du cascadeur au blouson scorpion de Drive, on s’envoie des œillades en dansant sur The Look de Metronomy, et Jamie XX remixe sa compatriote Adele, 21 ans, pour rouler dans les profondeurs d’un chagrin d’amour afin de s’en relever, en criant… comme Rémy Kolpa Kopoul aux grandes heures du Contrôle discal.
Réalisation, mixage : Mathieu Boudon.