On vous épargnera toute métaphore fruitière, mais aux Primeurs, on sait dénicher les talents tout juste murs (on était obligés). Et avec Nova, on a eu la presque primeur (décidément) d’y passer une soirée.
Depuis 25 ans, les Primeurs de Massy concoctent une sélection soignée et minutieuse composée autour d’une idée fixe : ne programmer que des artistes venant défendre leur premier album. Ce festival des premières fois, pépinière de jeunes talents, propose de mettre en avant ces artistes émergents en s’attachant à ce moment précis de leur début de carrière, celui du vrai acte d’affirmation et de synthèse.
Les Primeurs de Massy, c’est l’un des temps-forts de la salle des musiques actuelles Paul B. de Massy (depuis Paris et sa banlieue, on y accède facilement en RER) qui réunit chaque année familles, amis, professionnels, passionnés, fidèles et locaux dans un cadre convivial. Un public qui se fidélise avec les éditions et qui se plaît à découvrir de nouveaux noms sélectionnés par François Beaudenon, programmateur et nouveau directeur du festival.
Depuis la première édition de 1998, et l’évolution des différents formats de projets, celui de l’album peut être questionné. Lewis OfMan par exemple, qu’on aime vous faire écouter chez Nova, a sorti de nombreux singles et Eps avant de dévoiler récemment son premier album, Sonic Poems. François Beaudenon voit malgré tout dans ce format un sens assez fort dans la carrière des groupes, comme un acte de synthèse assez symbolique, et continuera, tant que les Primeurs perdurent, de proposer une programmation nichée autour de ce challenge du premier album.
Cette année encore, la programmation est réussie. Vingt groupes aux univers et inspirations différentes, aux esthétiques singulières, avec des projets aux identités fortes. Parmi eux, on peut notamment retrouver les habitués de nos ondes, Gwendoline, duo rennais imbibé au malt et à la cold wave, Lass, sénégalais à la voix brillante et vive, Lewis OfMan, dont les morceaux solaires nous offrent une bonne dose de vitamines D ou encore Julien Granel, à l’univers rempli de Cooleurs. À côté de ces têtes familières de Nova : Claire Days, Johnnie Carwash, Oete, Avalanche Kaito et bien d’autres découvertes musicales.
Paillettes et sculptures aériennes
Le pas de la porte franchi, on se retrouve dans une ambiance chaleureuse, conviviale et colorée. Et ce n’est pas Clément et Philippe qui vous contrediront. Ces deux habitués du lieu et du festival animent depuis 2006 le stand paillettes et jeux de foire, étape incontournable avant de s’immiscer dans les deux salles de concert.
Avant d’aller écouter Achile, auteur compositeur autodidacte dont l’inspiration rap se retrouve liée à la chanson française, on rencontre Karine Pommelet, à qui on doit la direction artistique du festival depuis plus de 20 ans. Une décoration qui s’articule entre sculptures, jeux de lumières et de couleurs, plongeant les spectateurs dans l’univers des Primeurs. Imaginer, penser, prendre le contre-pied du design de l’affiche, s’adapter aux contraintes, de lieu et de sécurité, une mission qu’elle prend très à cœur et qui permet de modeler la salle Paul B à l’image du festival.
Revenons à notre programmation du soir. Changement de salle après avoir découvert le jeune rappeur originaire de Tours qui, entre un ensemble Kappa et un piano-voix plein de douceur, a plongé les Primeurs dans son univers bienveillant.
Changement de salle donc, et changement d’ambiance. Avalanche Kaito déboule et surprend le public par son métissage musical entre un griot urbain burkinabé, vocaliste et multi-instrumentiste, et un duo noise punk belge. Le chanteur Kaito Winse, le batteur Benjamin Chaval et le guitariste en kilt Nico Gitto plongent la salle dans une trans indescriptible entre rock psyché et free jazz. Un univers déroutant, qui ne laisse pas le public indifférent.
Grand écart musical ensuite avec le concert de Pierre de Maere. Élégant et raffiné, le jeune belge à l’allure d’un chic dandy laisse glisser sa voix angélique pour proposer une pop mélancolique aux faux-airs de Stromae. Amour, douceur, tendresse et tourment, sûrement ce qui définirait au mieux le répertoire musical de Pierre de Maere.
Nouvelle découverte musicale ensuite avec le quintet de jazz-métal-médiéval (oui, vous avez bien lu) Ckraft. Ce groupe est à la confluence entre le jazz et sa liberté d’improvisation, le métal et sa puissance et le répertoire médiéval et ses mélodies empruntées aux chants grégoriens. Un mélange détonnant et efficace qu’on ne jouera pas tout de suite sur Radio Nova mais qu’on vous laisse découvrir.
La soirée se termine sur un show de Julien Granel et sa véritable énergie scénique percutante et contagieuse. Le chanteur aux influences rétro, disco et pop, aime la couleur, dans ses textes, ses compositions et jusque dans sa tenue. Un univers rempli de bonheur et d’ondes positives dans lequel on retrouverait à la même table John Lenon, David Bowie, Jamiroquai, Prince et évidemment notre cher Julien.
Julien Granel conclut cette troisième soirée des Primeurs en répétant en chœur ce refrain « C’est pas la mer à boire, on verra demain soir »… Un rendez-vous pris par le public pour cette dernière soirée qui les attend à Paul B. Une dernière sélection au goût (fruité) de saveurs musicales et de découvertes.