La jeune élue Démocrate mène campagne sur le terrain des idées et sur internet.
Dans Néo Géo, Liz Gomis fait le portrait d’Alexandria Ocasio-Cortez.
« Si nous disons au peuple américain que nous sommes plus disposés à investir et renflouer les grandes banques plutôt que d’investir pour nos agriculteurs et nos familles, alors je ne sais pas ce que nous faisons ici ».
Elle sait pourtant ce qu’elle fait, la représentante démocrate de New York, Alexandria Ocasio-Cortez. Cette prise de parole enflammée a eu lieu il y a deux semaines devant un parterre de sénateurs Républicains récalcitrants à l’idée d’évoquer les prochains enjeux climatiques. Cortez s’est illustrée par son charisme et son aisance dialectique, mais son Green New Deal, son plan de lutte contre le changement climatique qui consistait à imposer 100% d’énergies propres et renouvelables aux États-Unis d’ici 2035, n’a pas convaincu le camp adverse. Qu’à cela ne tienne…
À 29 ans, « AOC », comme on l’appelle aujourd’hui, est la nouvelle coqueluche de l’aile gauche Démocrate américaine, mais surtout la plus jeune élue à siéger au Congrès américain. Une élue aux origines portoricaines, née dans le Bronx, qui servait encore des tapas quelques semaines avant son élection surprise, devançant l’un des cadors du parti Démocrate en juin 2018. Les électeurs du 14ème district de New York lui ont donc fait confiance et depuis, elle s’évertue à ne pas les décevoir. Ses combats : la justice sociale et la lutte contre le réchauffement climatique, autant de sujets qui irritent les Républicains. Une campagne qu’elle mène sur le terrain des idées, mais aussi sur les internets.
AOC a l’énergie et la fougue de la jeunesse, la verve des meilleurs orateurs et maîtrise la communication comme personne. Milléniale à la pointe de la connexion, elle a fait des réseaux sociaux son terrain de jeu en prenant de cours la vieille école de politicards, à tel point que sa cote de popularité ne cesse de croitre. On dit qu’elle recrute jusqu’à 200 000 followers par semaine sur le réseau Instagram, ce qui ne manque pas de susciter quelques jalousies au sein de sa propre famille politique.
Une fulgurante ascension qui rappelle à certains égards celle de ce jeune sénateur de l’Illinois devenu président par deux fois, un certain Barack Obama, pour qui elle fait campagne en battant le pavé en 2008 alors qu’elle n’est pas encore majeure. Le militantisme chevillé au corps, elle choisit Bernie Sanders en 2016 face à Hillary Clinton lors de la primaire Démocrate. Il le lui rend bien aujourd’hui en la soutenant officiellement tout en prenant soin de se lancer prématurément dans la bataille des présidentielles de 2020.
Craindrait-on Cortez du côté des Républicains ? Donald Trump s’en amuse. Non seulement il ne considère pas la jeune parlementaire comme une adversaire potentielle mais la voit comme une émule d’Hugo Chavez, une agitatrice qu’il terrassera le moment venu. Côté Démocrate comme Républicain, on rit jaune parce que tous gardent à l’esprit qu’elle a gagné la primaire Démocrate avec une campagne de 19 400 dollars contre plus de 3 millions pour son adversaire. La chaine Fox a, de ce point de vue, entreprit sa campagne de désinformation massive portant les sujets d’AOC comme des annonces populistes irréalisables aux États-Unis. Mais dans la tête des déclassés et des déçus de Trump,une autre Amérique est possible sous Cortez : sans armes à feux, avec des universités gratuites, une couverture de santé universelle, des infrastructures vertes, bref, un programme qui semble tenir de l’utopie quand on regarde l’histoire des États-Unis. Est-ce qu’Alexandria Cortez pourrait relancer la machine du rêve américain en 2020, en tentant le coup d’éclat ? Yes she can !
Le Néo Géo du dimanche 7 avril 2019, c’est en podcast.
Visuel © Dimitri Rodriguez