Notre invité ce matin : le cofondateur lui-même, Silvain Gire !
En 2002 naissait le projet Arte Radio, une plateforme de créations audio originales, avec dès l’origine, le souci d’une grande qualité éditoriale et sonore. Tout comme nous, chez Radio Nova.
Silvain Gire est le co-fondateur d’Arte Radio. Il était notre invité ce matin dans Un Nova Jour Se Lève.
Arte Radio, le podcast avant l’heure ?
À l’origine, Arte Radio, n’avait, contrairement à la Radio FM, ni grille, ni format. C’était une webradio à la demande, proposant des petits fichiers audios téléchargeables.
Alors, Arte Radio inventeur du podcast ? Pas tout à fait, mais presque comme le rappelle Silvain Gire, cofondateur de la plateforme : « En 2000, John Lang, un Américain installé en France avait posé la première pierre avec ‘Le Donjon de Naheulbeuk’, de l’heroic fantasy parodique sous forme de saga mp3. C’est lui le vrai inventeur du podcast ».
Mais tout de même. À une époque où l’audio n’intéressait grand monde, Silvain Gire a fait un pari.
« C’est sûr qu’il n’y avait pas de manifestations dans les rues pour revendiquer du son de qualité, sans commentaire de journaliste et une absence de musique à la radio », commente-t-il. Si Arte n’avait pas de projet très précis pour Arte Radio, la chaîne a laissé à Silvain Gire une grande liberté.
C’est ainsi que le projet a pris forme, et que des rendez-vous réguliers se sont créés, parmi lesquels Un podcast à soi, Dépêche, Vivons heureux avant la fin du monde, Bookmakers… pour n’en citer que quelques-uns. Des séries culte se sont également développées, comme Crackopolis, Gardiens de la paix ou encore Coming in, …
Un espace pour le « je »
Pionnière, Arte Radio l’a aussi été sur le plan de la narration, introduisant des formes de récit de soi.
« On a fait apparaître ces formes de récit sur Arte Radio tout simplement parce qu’on n’avait pas le droit de le faire ailleurs« , rappelle Silvain Gire, également journaliste. « Quand on est journaliste, on n’a pas le droit de dire « je ». Or il y a des expériences dans la vie qui ne peuvent se raconter autrement qu’à la première personne ».
Une manière de connaître le monde à travers sa sensibilité, explorée par Perrine Kervran avec Je découvre mon enfant, où elle raconte toutes ses interrogations au moment de l’arrivée de son nouveau-né, ou encore par Delphine Saltel et son Journal d’une jeune prof, au sujet de son expérience de professeure de lettres dans un collège de banlieue.
Les laboratoires d’Arte Radio à ciel ouvert et en déloc’ au Palais de Tokyo
Pendant 10 jours, Arte Radio a pris ses quartiers dans les sous-sols du Palais de Tokyo, permettant au grand public de découvrir toutes les étapes de la création d’un podcast, de la conceptualisation au mixage, en passant par les enregistrements, les bruitages, la réalisation…
« La Dernière nuit d’Anne Bonny », une toute nouvelle fiction
Le podcast La Dernière Nuit d’Anne Bonny, qui vient tout juste de sortir sur la plateforme, est un parfait exemple de cette découverte à 360°. Cette fiction sonore est signée par la journaliste Claire Richard. Elle relate la vie d’une pirate du 18e siècle, née dans un petit village d’Irlande et que l’on retrouve à l’autre bout du monde, dans le Golfe du Mexique. Une femme qui a inspiré de nombreux mythes.
« La dernière nuit d’Anne Bonny joue avec les archives et les registres pour explorer la fascination qu’elle suscite, l’écart qui peut se creuser entre une figure historique et ses réinterprétations contemporaines. Sans jamais oublier de faire battre le cœur, et de raconter une grande histoire d’amour et de liberté ».
Samedi 10 décembre au soir, Arte Radio a convié le bruiteur Franck Tassel, qui, dans le cadre de son métier, a travaillé auprès des plus grands cinéastes, parmi lesquels Michael Haneke.
Franck Tassel donc, ce génie du bruit, crée des sons à partir de rien (ou presque). Objets du quotidien, objets de récupération… tout est source d’inspiration. Et Dieu sait que le son dans les fictions sonores, c’est important.
Démonstration à l’appui, il a raconté comment, dans ce podcast consacré à Anne Bonny, il a été amené à suggérer le bruit du vent qui souffle dans les palmiers.
Pour cela, rien de tel que de frotter des fils de bobine de radio entre eux… Et de rajouter un bruit de vent à la réalisation. C’est simple, et ça marche.
« À l’époque, on enregistrait sur des bandes analogiques. Aujourd’hui, on n’a plus cette contrainte, on peut avoir plein de pistes. On prend de la matière et on peut superposer plein de sons« , explique Franck Tassel, dont le père était également bruiteur.
Dans une scène particulièrement spectaculaire au beau milieu de la mer, le bateau d’Anne Bonny est en pleine bataille. Le mât grince et le mât rompt. Des bruits réalisés en manipulant les barreaux d’une échelle puis en enfonçant franchement son pied dans une palette en bois. Ingénieux, vous avez dit ingénieux ?
C’est la même échelle qui lui a servi à imiter le balancier du hamac, légèrement grinçant.
« C’est la magie du bruitage : avec le même son, on va pouvoir obtenir de nombreuses choses. Si la narration est bonne, ça fonctionne ! », selon Franck Tassel.
La soirée s’est poursuivie autour d’une discussion entre les artisans du podcast : l’autrice Claire Richard, le réalisateur Arnaud Forest et la réalisatrice Sabine Zovighian, le programmateur musical Michael Liot (ancien programmateur sur Nova !), et Silvain Gire.
Un échange particulièrement éclairant permettant de comprendre, à partir de l’exemple d’un podcast, la façon dont naît et se crée une fiction sonore.
« À tout moment, ça peut foirer”, a déclaré Silvain Gire. Au moment du casting – qui dans le cas présent a réuni 20 comédiens, dont Catherine Hiegel de la Comédie française, au moment du choix des musiques, au moment du tournage…
On retrouve là le goût du risque, ou, pour le dire autrement, le grand Pari d’Arte Radio.